ds_gen N. 8 – 2009 – Memorie//Africa-Romana

 

Jean-Pierre Laporte

Année Epigraphique, CNRS Paris

 

Trois sites militaires sévériens en Algérie moyenne: Grimidi, Tarmount (Aras), El Gahra

 

 

(pubblicato in L’Africa romana. Ai confini dell’Impero: contatti, scambi conflitti. Atti del XV convegno di studio. Tozeur, 11-15 dicembre 2002, a cura di M. Khanoussi, P. Ruggeri, C. Vismara, Roma, Carocci editore, 2004, I, pp. 439-477)

 

sommario:  1. Aïn Grimidi (Maurétanie Césarienne). Situation. – 1.1. La dedicace du camp. – 1.2. Fouilles, visites et mention. – 1.3. Armes et garnison. – 1.4. Le plan de ruines. – 1.5. Source et fort. – 1.6. La ville. – 1.7. Une fortification interieure. – 2. Tarmount (Aras) (Maurétanie Césarienne puis probablement sitifienne). Situation. – 2.1. Plan du camp. – 2.2. Portes. – 2.3. Bâtiment énigmatique. – 2.4. Tours. – 3. El Gahra (Numidie). Situation. – 3.1. Histoire. – 3.2. Fouilles, visites, et mention. – 3.3. Plan. – 3.4. L'occupation romaine au sud-est de la Numidie (et au sud de la Césarienne). – 3.5. ètabilissement progressif de l’ocupation romaine. – 3.6. La «route du nord». – 3.7. La «route du sud». – 4. Survie générale.

 

Malgré de nombreux travaux sur les frontières romaines en Algérie, et avant même les vérifications et prospections sur le terrain qui seraient indispensables, il est encore possible de compléter les informations disponibles à partir de publications anciennes revisitées, et de la confrontation d'archives conservées à Aix, Paris et Alger. Nous apporterons ici quelques éléments sur trois sites: Aïn Grimidi, Tarmount (Aras) et El Gahra[1].

 

 

1. – Aïn Grimidi (Maurétanie Césarienne). Situation

 

Le site d'Aïn Grimidi[2], dont le nom antique n'est pas connu, est situé à 4 km à l'ouest de Sidi Aïssa, sur la nova praetentura sévérienne. Les ruines antiques occupaient un plateau étroit, à 760 m d'altitude, défendu au nord par des ravins, au sud par la chaine escarpée du Naga (1000 m), plateau qui commande les vallées supérieures, largement ouvertes, de l'oued el Ham et de l'oued Djenane, qui menaient l'une vers Rapidum, l'autre vers Auzia. «Barrant ces deux voies, à mi chemin entre elles, la citadelle apparaissait elle-même hors d'atteinte sur son plateau resserré. La position était ainsi très forte et elle permettait de surveiller tout le bassin occidental du Hodna, d'où pouvaient déboucher les pillards»[3]. Outre l'intérêt militaire de la position, les alentours montraient d'importantes capacités agricoles. Le site surplombait en effet une large plaine alluvionnaire qui s'étend, sur plus [p. 440] de 12.000 hectares, à l'ouest et au sud du Djebel Naga; elle est sillonnée en tous sens par les cours incertains et sinueux de 1'oued el-Ham et de son affluent l'oued Beddiab et parcourue par un réseau antique d'irrigation alimenté par un important barrage romain à Ced El-Kherza[4]. Selon Desrayaux, c'est «la plus fertile en céréales qui soit sur tout ce versant du Hodna»[5]. Un centre agricole était établi en contrebas de Grimidi, à Guelali, «dont les ruines, au moins aussi importantes que celles de Grimidi, occupent la partie baute de ce vaste domaine de l'Oued el Hamir»[6].

 

1.1. - La dédicace du camp

 

Le site est surtout connu des historiens par un fragment de dédicace découvert en mai 1886[7]. L. 1,35 m; h. 0,78 m; ép. 0,20 m. La mention de C. Octavius Pudens, procurateur de Césarienne vers 198-199[8], rapporte au règne de Septime Sévère et de ses fils, et assure la restitution du CIL VIII:

 

imp. caes. l. septimius severus pius PERTINAx AVG aRAbic.

 

adiabenic. parthic. maximus pont. maxiMVS TRIB pOTESt IMP.. cos.

 

…….. et imp. caes. m. aureliuS ANTONINVS AVG eT

 

l. septimius geta caes. ….maureTANIÆ CÆSARIENSIS

 

                                              PeR oCTAVIVM  PVDENTEM

 

                        procur. suum a                   CENSIBVS

 

Un comptage sommaire des lettres montre que l'inscription pouvait se développer sur trois pierres, dont seule a été retrouvée celle de droite. Le bandeau complet devait mesurer près de quatre mètres [p. 441] de long; il surmontait probablement la porte principale du fort qui dominait le site et prés duquel il a été trouvé[9]. Le texte porte à la ligne 4 la mention de la province, précédant le nom du gouverneur. Nous sommes dans les normes d'une importante construction militaire. On peut restituer une formule du genre pro pace (ou securitate) provinciae Mauritantae Caesariensis[10], suivi de l'énoncé de l’œuvre et du verbe, puis du gouverneur (ou inversement)[11]. Cette inscription entre dans une série de dédicaces de grands établissements "sécuritaires", à formules comparables, établis dans le contexte [p. 442] texte général d'un plan général de renforcement du dispositif militaire africain, conçu peut-être par le préfet du prétoire Plautien[12] et exécuté par les deux gouverneurs de provinces, Anicius Faustus en Numidie, Octavius Pudens en Maurétanie[13]. C'est sous C. Octavius Pudens, gouverneur de Césarienne vers 198-199, que lut installée la partie orientale de la nova praetentura sévérienne, œuvre continuée vers l'ouest sous son successeur P. Aelius Peregrinus (201-203)[14].

Nous avons donc une bonne idée de la date et des circonstances de l'établissement militaire romain à Aïn Grimidi (tout en ignorant s'il y avait déjà auparavant un village à cet endroit privilégié par sa source). Par la suite, l'épigraphie n'étant guère éloquente, l'archéologie, même réduite à sa version du XIXe siècle, peut donner quelques éléments complémentaires.

 

1.2. - Fouilles, visites et mentions

 

Les ruines avaient été signalées la première fois par Maillefer en 1858[15]. En juillet 1871, elles firent l'objet de fouilles du colonel Trumelet, commandant la subdivision d'Aumale[16]. Il signala dans la nécropole quelques monnaies des IIIe et IVe siècles, un masque en bronze, plusieurs casques en bronze brisés, des fers de lance, des anneaux, des débris de bois brulés, des lampes en terre, des urnes cinéraires[17]. En [p. 443] 1885-86, le colonel Fix, commandant la subdivision d'Aumale[18] s'intéressa lui aussi à l'archéologie de son secteur. Il fit procéder à diverses fouilles et lever des plans de nombreuses ruines de la région par plusieurs de ses officiers[19]. En mai 1886, G. Collinet de la Salle, sous-lieutenant à la 4e Compagnie de discipline se trouvait à Aïn Grimidi, où il découvrit notamment la dédicace à Septime Sévère que nous avons examinée[20]. C'est probablement à la suite des mêmes fouilles que le site fut évoqué dans des termes semblables en 1888 par Bourjade[21] et en 1890 par De Cardaillac[22]. En mars 1905, le lieutenant Desrayaux, adjoint de deuxième classe aux affaires indigènes, et capitaine au 3e régiment de tirailleurs algériens, examinait les ruines et les alentours et envoyait un rapport "provisoire" à son capitaine, chef de l'annexe de Sidi Aïssa, en attendant une exploitation plus précise[23]. Ce rapport, utilisé par St. Gsell, dans l’Atlas de l'Algérie[24], fut publié [p. 444] intégralement dans la «Revue Africaine» de 1911[25]. Desrayaux ne semble pas avoir effectué par la suite les recherches qu'il appelait de ses vœux. Le site retomba dans le silence, jusqu'à ce qu'en 1984, P. Salama rassemble les renseignements connus et publie les pièces d'armement conservées an Musée d'Alger[26].

 

1.3. – Armes et garnison

 

La dédicace ne mentionnait apparemment pas l'unité qui construisit le camp. Ce sont probablement ses soldats qui étaient enterrés avec une partie de leur équipement, pointes de lance, umbo, casques et masque[27], dans la nécropole fouillée en 1871[28]. Le masque [p. 445] d'exercice[29], qui devait faire office de visière à un casque (des trous servant à l'attacher sont encore visibles sur les bords partiellement détruits), se distingue par l'élégance et la grande liberté de traits du visage représenté. Le casque monobloc, en fer, était muni d'une visière rabattante en plaque de bronze évidée[30], et orné de lames de bronze. On peut le replacer dans des séries bien connues datables de la fin du IIe siècle et du début du IIIe siècle attribuables à des cavaliers. Compte tenu à la fois de l'histoire du site et des typologies auxquelles on peut les rapporter, ces deux éléments doivent dater de la première moitié du IIIe siècle. Avec les autres armes découvertes en 1871, ils permettent de penser que l'unité stationnée à Grimidi[31] était un détachement d'une aile ou d'une cohorte "ethnique". En effet, la présence d'armes dans des tombes est inhabituelle dans la mesure où les soldats romains les payaient mais n'en étaient pas propriétaires (en quelque sorte, ils les "louaient" à l'État). Elle est attestée parfois aux marges de l'Empire, où des unités auxiliaires, d'origine ethnique particulière, pouvaient conserver les usages des peuples dans lesquels elles avaient été levées. Ceci correspond bien à la situation en Maurétanie césarienne: les postes de la nova praetentura sévérienne étaient effectivement occupés par différentes ailes et cohortes «ethniques»: Thraces, Sicambres, Sardes... Ici, compte tenu de l'exigüité du camp, il pouvait s'agir d'un détachement de l'une de ces unités, qu'il n'est pas possible d'identifier à ce jour. On pourrait penser à la IVe cohorte des Sycambres[32], dont les castra hiberna furent établis non [p. 446] loin de là à Tatilti, également sous C. Octavius Pudens (198-199)[33], mais cette idée reste fragile.

 

1.4. - Le plan des ruines

 

Le plan de la ville donné ici résulte d'une compilation d'éléments publiés et de documents inédits. Il ne faudrait pas en surestimer 1'exactitude[34]. Malgré tout, il permet de donner une idée d'ensemble[35]. Les vestiges avaient été ravagés par le thalweg de l'oued Hamir et par les fouilles de 1871 et 1886. Peu avant 1905, la partie nord avait servi de carrière de pierres lors du tracé du chemin de Sidi Aïssa à Chellala des Adaoura qui la prenait en écharpe[36].

 

1.5. – Source et fort

 

Le choix du site avait probablement été dicté par l'abondance de l'eau fournie par Aïn Grimidi («la source aux tuiles», on «aux poteries»), captée avec soin[37]. Elle était dominée par une enceinte rectangulaire de 65 x 44 m, flanquée de tours aux angles, ainsi décrite par Desrayaux[38]:

 

Les grandes faces nord et sud sont formées de deux murs accouplés avec, entre eux, une série de logements étroits. Les deux autres faces plus courtes [p. 448] offraient peut-être une disposition analogue aujourd'hui masquée par les décombres. On distingue deux portes: une porte nord et une porte sud; celle-ci, la plus importante, marquée par la présence de pierres de taille et un dispositif de défense plus confus, des tours sans doute. Celles des angles ne sont plus apparentes que par les monticules circulaires qu'ont formés leurs matériaux écroulés. On peut dire, seulement, que ces tours étaient extérieures[39]. A l'intérieur de l'enceinte, et sur le trajet des deux portes, se trouve une ruine circulaire (O) mal définie, qui pourrait être celle d'un logement spécial ou de la superstructure d'un large puits.

 

L'imprécision du plan, notamment en ce qui concerne les tours, qui n'y sont pas indiquées, doit interdire d'interpréter le plan de cet édifice, dont nous ne retiendrons que le caractère militaire, pratiquement certain.

 

1.6 - La ville

 

Suivant un phénomène classique, une ville s'établit à proximité du fort. Un rempart de près d'un 1 kilomètre de long protégea une superficie d'environ 5,5 ha. La ville se répartissait en deux quartiers séparés par le ravin de l'oued el Hamir. «Le quartier sud en amphithéâtre sur la rive droite laisse voir la plupart de ses murs, qui, tous construits en moellons, atteignent un mètre d'épaisseur au rempart». Mesurée sur le plan, l'enceinte pouvait mesurer près d'un kilomètre de long. De nombreux bâtiments furent construits à l'intérieur de la surface protégée. Pour alimenter en eau l'agglomération, Aïn Grimidi ne suffit plus. On alla capter à 530 m à l'est un groupe de trois autres sources, Aïn Tolba. Un aqueduc en pente douce et uniforme courait le long du coteau et conduisait l'eau à l'intérieur de la ville où elle se déversait dans de grandes citernes, de 20 x 18,60 m, divisées en trois compartiments parallèles.

Des vestiges divers ont été signalés aux alentours: à 300 mètres à l'est, un fortin (?) rectangulaire (26 x 16 m) devait surveiller les sources abondantes d'Aïn Tolba. A l'ouest, à Aïn Sidi Taïeb, s'élevait une enceinte carrée de 36 mètres, avec des tours rectangulaires aux angles. En revanche, une bonne part des prétendues "vigies" signalées dans le voisinage devaient être en fait des bazinas.

 

1.7. - Une fortification "intérieure"

 

L’un des aspects les plus remarquables du site est la présence à l'intérieur de la ville d'un tronçon de rempart (K-L). Comme le souligne Desrayaux[40], les bastions qui le flanquaient étaient tournés vers le fort, et défendaient en conséquence contre une menace pouvant venir de ce côté. Il semble bien que ce second rempart ait été construit lors d'une restriction de surface de la ville, sans doute après le départ de la garnison, comme à Rapidum[41].

Jusqu'à nouvel informé, et malgré les insuffisances du plan, nous pouvons énumérer plusieurs épisodes distincts de la vie antique de ce site:

-     la construction du fort, vers 198 d'après la dédicace;

-     l'établissement de constructions civiles autour du camp;

-     la protection de cette agglomération par un rempart "civil", comme à Rapidum[42];

-     le départ de la troupe à une époque indéterminée;

-     une restriction de surface de la ville, avec l'abandon de la zone du fort;

-     une survie de la ville jusqu'à une date inconnue.

Il va de soi qu'une nouvelle étude sur les lieux pourrait apporter des données plus riches que le sort fait habituellement aux forts et fortins du limes: «fondés en (date), par (nom d'unité), abandonnés en (date)», comme si seule importait l'implantation de l'armée romaine, et bien peu l'agglomération civile voisine (qu'elle lui ai préexisté, ou qu'elle soit née à son contact), qui, dans nombre de cas, semble lui avoir survécu fort longtemps.

[p. 450]

 

 

2. – Tarmount (Aras) (Maurétanie Césarienne puis probablement sitifienne). Situation

 

Tarmount (en berbère, "la grenade") se situe à 28 km à vol d'oisean au nord-ouest de M'sila, sur une route antique d'Auzia vers Zabi, par Souk-el-Khemis (Galaxia?)[43], Taraess (Tatilti) et enfin Aras. Cet endroit a livré les vestiges d'une petite agglomération établie autour d'un camp fondé en 201-203 par une unité non identifiée à ce jour[44]. Le nom antique du site, Aras, semble, non pas romain, mais libyque. En berbère, il signifie "le lion", toponyme que l'on retrouve aujourd'hui tant dans Souk Ahras que dans Arris, une ville ancienne de 1'Aurès. En fin 1934 et fin 1935,  P. Massiéra y effectua des dégagements importants[45]. Le rapport très complet pour 1'époque (avec même des photographies aériennes!) fut hélas publié sans les plans. Ceux que nous avions pu restituer en 1994 d'après les descriptions très précises de Massiéra[46] peuvent être améliorés grâce à la lecture de photographies des plans originaux dans les Archives de l'Agence Nationale d'Archéologie[47] et de photographies [p. 451] des ruines après les fouilles, conservées par la Photothèque du centre Camille Jullian[48].

 

2.1. – Plan du camp

 

Le Camp, construit sous le procurateur de Césarienne P. Aelius Peregrinus (201-203)[49], mesurait 200 m de long sur 170 m de large, soit une superficie totale de 3,4 hectares. Notre restitution [p. 453] de 1994 est confirmée, et l'emplacement des tours, resté incertain, est enfin précisé[50].

 

2.2. – Portes

 

Les portes étaient hiérarchisées. La porte nord ne comportait qu'un vestibule sans protection antérieure, mais nous la connaissons mal[51]. La porte sud, un peu plus importante que les autres, était par ailleurs couronnée par la dédicace sévérienne. Plans et photographies confirment notre restitution de l'état primitif des deux portes ouest et sud, dont le plan, classique[52], remonte certainement à la fondation sévérienne, et permettent de comprendre les remaniements tardifs signalés dans le texte de Massiéra.

A basse époque, la porte ouest avait été entièrement obstruée par deux murs de moellons grossiers barrant les deux arcs successifs[53]. Tous les deux étaient traversés à 1 m au dessus du sol antique par des conduits d'évacuation d'eau. Un canal retrouvé à 3,30 m au dessus du sol primitif était encore beaucoup plus tardif.

Plus intéressant encore, nous pouvons maintenant comprendre et dessiner les réaménagements tardifs de la porte sud[54], [p. 455] bien décrits dans le rapport de Massiéra[55], mais que nous n'avions pas su restituer en 1994. A basse époque, le passage principal avait été obstrué par un massif (A) formé de 3 murs en moellons grossiers (A, B, C) épais de 0,40 m. L'espace centrai avait été remblayé avec des débris divers (terre, cailloux, moulures diverses deux voussoirs, milliaire d'Aurélien, etc.). Une petite poterne (D) avait été ouverte dans la tour orientale. L'ouverture pouvait être fermée en, roulant dans une sorte de gouttière une roue de pierre (C) qu’un couloir étroit ménagé à droite de l'ancien passage (B) permettait de manœuvrer facilement de l'intérieur du camp sans s'exposer aux coups de l'ennemi. En Algérie, ces roues de pierre sont des dispositifs tardifs, que l'on rencontre, sans doute vers la fin du Ve siècle, dans plusieurs des Djedars de Frenda[56], et surtout à l'époque byzantine.

 

2.3. – Bâtiment énigmatique

 

Dans l'angle nord-est du camp, Massiéra avait signalé un bâtiment énigmatique, juché sur un socle plein de près deux mètres de haut, entoure par un mur épais. La restitution de 1994 reste valable[57], a ceci près que l'escalier d'accès était plaqué le long du mur (et non pas perpendiculaire au bâtiment dans l’axe de la porte). Ce bâtiment très particulier, spécialisé et construit avec beaucoup de soin, était probablement contemporain de construction du camp. Sa destination reste inconnue il ce jour.

 

2.4. – Tours

 

Massiéra, qui avait reconnu un peu plus de la moitié occidentale camp, signale sept tours («bastions») et pensait qu'il devait y avoir douze en tout. Le plan de ces tours à «talon», débordantes à la fois à l'intérieur et à l'extérieurs du rempart, ne parait pas sévérien[58]. Ces tours à «talon» devaient appartenir à une réfection [p. 456] d 'époque indéterminée, mais relativement ancienne (IIIe ou IVe siècle). Les sept tours découvertes présentaient les mêmes dimensions à 25 cm près. Elles ne différaient guère que par la position de la porte, au milieu du fond sur les tour B, E, F, à gauche pour A, C, D, et dans la partie arrière du mur de droite pour G[59].

Des milliaires furent érigés aux alentours d'Aras depuis Caracalla jusque sous Julien[60], ce qui confirme dans le secteur nord du Hodna la longue survie de l'occupation romaine dans la région de la nova praetentura sévérienne, soulignée plus à l'ouest par P. Salama[61]. Mais nous ne savons pas jusqu'à quelle date le camp resta occupé. Le village, né probablement du camp, eut une longue vie. Un évêque donatiste y est attesté en 411[62]. Massiéra a signalé à 300 m à l'est du camp les vestiges d'au moins deux basiliques chrétiennes. Le plan de l'une d'elles s'est révélé pratiquement identique à celui que nous avions restitué en 1994[63].

A une date certainement tardive, une tour ronde en saillie remplaça l'angle arrondi du camp sévérien, au moins à l'angle sud-ouest et probablement à l'angle sud-est[64]. L'entrée était formée par un couloir oblique par rapport aux courtines, avec un arrondi situé vers l'intérieur du camp[65] (et non vers l'intérieur de la tour [p. 457] comme nous l'avions cru en 1994). Nous avons évoqué à ce sujet l'époque byzantine, avec des exemples très proches, notamment à Bagaï[66]. N. Duval s'est montré prêt à accepter l'argument, bien qu'il soit assez faible[67]. La forteresse sévérienne, sans doute déjà retouchée, pourrait donc avoir été restaurée à l'époque byzantine, c'è qui ferait d'Aras l'un des sites les plus occidentaux occupés par les Byzantins à l'intérieur du Maghreb, sans doute peu après 540, qui vit une installation byzantine à Zabi, devenue Zabi Iustiniana[68].

L'un des bâtiments de la ville civile comportait un linteau à décor chrétien bien décrit Massiéra en 1936[69]. Il nous avait semblé que le chrisme central, en forme de croix monogrammatique pattée, avec une minuscule boucle du rho, datait du début de l'occupation byzantine. Sans écarter cette datation, N. Duval a estimé, comparaisons à l'appui, que l'on ne peut exclure le Ve siècle[70].

La ville survécut ensuite, dans des formes et des conditions que nous ne connaissons pas. Elle semble attestée par El Bekri au XIIe siècle sous le nom de Haz[71].

Les étapes de la vie du site sont donc multiples:

- construction du camp en 198;

- établissement (probable) d'une ville civile à proximité du camp (nous ne savons pas si elle fut entourée par la suite d'un rempart);

- construction de basiliques (sans doute dans la ville), à 300 mètres a l'est du camp;

- réoccupation et réaménagement probable du camp (tours d'angle), à l'époque byzantine;

- remaniements tardifs d'époque inconnue dans le camp (condamnation de la porte ouest, restriction de la porte sud);

- survie de la ville, attestée au XIIe siècle, sans que la continuité (probable) soit assurée.

[p. 458]

 

 

3. – El Gahra (Numidie). Situation

 

El Gahra (ou Kherbet-el-Gahra) se trouve à environ 70 kilomètres au sud-est de Bou-Saada; le site est situé sur l'oued Chaïr[72], c'est à dire "l'oued aux orges", ce qui dit bien l'intérêt agricole des alentours, qui était le même dans l'antiquité[73]. L'établissement romain surveillait un passage qui s'ouvre entre le Hodna et le Sahara par la plaine d'Aïn Rich et la vallée de l'Oued Chaïr, entre les monts des Ouled-Naïl et ceux du Zab, On pouvait aller facilement vers le Sahara par Aïn-Kahla, vers l'occident, par Aïn-Melah et Aïn-Ograb, et enfin vers le nord par Bou-Saada. L'endroit a été bien choisi dans la mesure où l'oued Chair, pérenne et assez abondant, doit traverser par une série de chutes une suite de strates rocheuses redressées presque à la verticale.

 

3.1. – Histoire

 

On ne connaît pas à ce jour le nom antique du site[74]. Il était fréquenté depuis longtemps par une population autochtone qui a laissé de très nombreuses tombes protohistoriques[75], notamment [p. 459] des bazinas[76], dont certaines peuvent d'ailleurs être postérieures à l’époque romaine[77].

Comme l'a suggéré J. Carcopino, le site a été occupé par l'armée romaine au plus tard au moment de la fondation de Castellum Dimmidi en 198[78]. Il a livré une trentaine d'inscriptions dont on trouvera la liste en annexe[79]. La dédicace de l'établissement militaire n'a pas été signalée il ce jour. L'une des plus anciennes inscriptions est l'épitaphe d'un miles de la IIIe légion Auguste datable du règne de Caracalla (inscr. 1) C'est d'une époque voisine que doit dater une dédicace à Mithra par un centurion de la IIIe légion, en compagnie d'un décurion de l'aile des Pannoniens (inscr. 2). Ceci montre une garnison constituée à la fois de légionnaires (épitaphes 8 à 11), commandés par un centurion, et d'auxiliaires in détachement de l'Ala Pannoniorum (inscr. 2) et/ou de l'Ala Flavia  (inscr. 12), commandés par un décurion d'aile (inscr. 2). El Gahra se trouvait à cette époque à l'extrémité d'une route directe vers El Kantara, qui prenait une importance nouvelle[80]. On ne sait pas  dater une dédicace mutilée à un empereur sévérien non identifié (inscr. 3). Sous Alexandre Sévère (222-235), le légat de la IIIe légion L. Apronius Pius (vers 225-226) fit élever une dédicace à la une (inscr. 4), et la route vers Ausum (Sadouri) fut bornée (inscr. 5). Après la dissolution de la IIIe légion en 238, les légiones et peut-être leurs auxiliaires semblent avoir été remplacés des Palmyréniens (inscr. 6), déjà présents dans la région sous [p. 460] Alexandre Sévère[81], qui apportèrent le culte de leur dieu Malagbel (inscr. n° 7). Les nécropoles ont livré des épitaphes de civils (inscr. nn° 13 à 30). Une inscription trouvée à 2 km au sud-ouest d'El Gahra (inscr. n° 31), mentionne un domaine impérial affermé à des conductores[82]. A ce jour, l'épigraphie ne permet pas de dire ce qu'il advint du camp et de la ville après le milieu du IIIe siècle. Carcopino estimait, sans doute à juste titre, que des troupes (non nommées) ont pu stationner à El Gahra jusque sous Julien au moins[83].

L'archéologie peut donner quelques éléments complémentaires, même si nous ne disposons aujourd'hui que de descriptions anciennes.

 

3.2. – Fouilles, visites, et mentions

 

Les ruines d'El Gahra ont été signalées dès 1857 par le capitaine Davenet[84], puis en 1865 par Reboud[85] qui y releva douze inscriptions[86]. Berbrugger mentionna à cet occasion un plan que nous [p. 461] n 'avons pu retrouver à ce jour[87]. En 1881, le CIL recensa 11 inscriptions publiées[88]. En 1886, le lieutenant Collinet de Lassalle, celui-là même qui avait fouillé au début de l'année à Aïn Grimidi[89], séjourna quelque temps à El Gahra et y effectua des fouilles. Il en rendit naturellement compte à son supérieur, et l'année suivante le colonel Fix communiquait à l'Académie d'Hippone pas moins de 14 inscriptions nouvelles tirées des ruines[90]. En 1889, Lassalle, devenu lieutenant, envoya au CTHS une notice largement reproduite et commentée en 1889 par R. Cagnat[91]. Par la suite, des inscriptions et des stèles furent transportées à diverses reprises au bureau arabe de Bou Saada. En 1902, Gsell cita le barrage[92]. En 1902-1903, des membres des Brigades topographiques visitèrent le site[93]. Ils envoyèrent à Cagnat les estampages de plusieurs inscriptions, ce qui lui permit de corriger le texte de CIL VIII, 18025 et de donner le texte d'une épitaphe d'un soldat de la Legio III Augusta[94]. Les inscriptions connues furent rassemblées en 1904 par le supplément au CIL VIII[95]. En 1905, N. Bernard, officier des Affaires indigènes, examina les ruines et rédigea une notice manuscrite (non retrouvée à ce jour), qui fut utilisée par Gsell dans l'Atlas en 1911[96]. En 1913, Cagnat mentionna naturellement El Gahra dans l'Armée romaine d'Afrique[97]. Onze ans plus tard, [p. 462] Carcopino y passa le 28 avril 1924[98]. Il le décrivit sommairement[99], en y relevant une épitaphe mentionnant l'Ala Flavia, et à 2 km au nord-est un milliaire au nom de Sévère Alexandre (partiellement martelé)[100]. Il signala également, outre un grand bronze d'Hadrien, une monnaie de Septime Sévère et une dizaine de Constantin[101]. Reprenant ses notes l'année suivante[102], Carcopino cita El Gahra à plusieurs reprises, en donna même un plan, publia le texte du milliaire d'Alexandre Sévère[103] et des relectures de plusieurs des inscriptions (alors à Bou Saada) et décrivit des stèles qui y avaient été trouvées[104]. Il signala également à 2 km au nord-ouest une inscription mentionnant des conductores[105]. Quelques années plus tard, Albertini cita les inscriptions d'El Gahra à propos de celles d'El Kantara[106]. En 1936, Leschi signala à nouveau une épitaphe d'un soldat de la IIIe légion[107]. En 1947 et 1948, G.-Ch. Picard y passa à plusieurs reprises sur le chemin de Castellum Dimmidi. En 1949, il cita le site à pas moins de 15 reprises, malheureusement [p. 463] sans le décrire[108]. De son côté, Baradez survolait et visitait les ruines. En 1949, il mentionna El Gahra à 18 reprises hélas sans en donner de photographie aérienne[109]. Par la suite, El Gahra a été signalé dans des ouvrages généraux. En 1966, Le Glay cita quatre stèles à Saturne, d'après Carcopino[110]. En 1979, [p. 464] E. Fentress rappela le plan de Carcopino et la description de Lassalle[111]. Ce fut aussi le cas de Y. Le Bohec en 1989[112].

 

3.3. – Plan

 

En attendant une révision des ruines elles-mêmes, nous nous limiterons à présenter ici un plan général, synthèse nouvelle entre divers documents, notamment ceux de Carcopino et de Lassalle. Ce plan montre une ville murée approximativement rectangulaire de 480 m sur 360 m, soit 15 hectares, entourée par un rempart de pierres irrégulières épais de 1,50 m, flanqué, tous les 50 m environ, de bastions, tantôt intérieurs et extérieurs, et percé de quatre portes (A, B, C, D), une sur chaque face, sans compter deux poternes (e et f)[113], L'intérieur est occupé par des constructions nombreuses, apparemment toutes orientées nord-sud et est-ouest, séparées par des voies apparemment rectilignes, bien que le réseau ne soit pas absolument régulier.

Englobant 15 hectares, l'enceinte «principale» n'abritait en effet certainement pas la seule garnison[114]. Comme à Rapidum ou à Aïn Grimidi, ce pourrait être une enceinte civile destinée à abriter l'agglomération qui ne put manquer de se développer au contact du fort. La nature des inscriptions retrouvées permettant d'assurer que le développement du site correspond à une occupation militaire (bien que nous ne disposions pas ici de la dédicace principale du camp), nous sommes amenés à rechercher le fort proprement dit. Un bâtiment rectangulaire (n° 1), situé dans la ville près de la porte C, mesurant environ 30 m sur 6o, semble avoir comporté deux enceintes épaisses, protégeant un lacis complexe de pièces de tailles diverses. Examinant le plan de Carcopino, E. Fentress s'est demandée s'il ne s'agissait pas d'une fortification tardive[115]. On [p. 465] pourrait tout aussi bien y voir le fort primitif[116]. La question parait ouverte.

Les ruines ont livré jadis de nombreux vestiges[117]: inscriptions futs de colonnes, chapiteaux, bases, auges, meules, une statue d'homme en toge (transportée a Bou Saada), de nombreux débris de poteries rouges vernissées (probablement des sigillées). Plusieurs caissons, transportés à Bou Saada, représentaient des personnages tenant un oiseau et une grappe de raisin, accompagnés parfois d'un bélier[118]. Tout ce matériel, dont des dessins ont été retrouvés, présente une forme parfaitement classique qui étonne quelque peu à cet endroit éloigné du centre de la Numidie. Il s'agit d'un morceau de romanité planté tel quel dans le pré-désert a la toute fin du IIe siècle et an début du IIIe. On se préoccupa naturellement de l'alimentation en eau. Une conduite d'eau venant d'Aïn Mezerzou, à une dizaine de kilomètres au nord-ouest[119]. A 3 km en amont de la ville, l'un des barrages naturels avait été surmonté d'un barrage artificiel d'où partait sans doute une conduite permettant d'alimenter la ville. A quelques centaines de mètres en amont de la ville, subsistaient d'autres restes de barrages en galets, qui devaient servir à des irrigations dans la plaine, sur la rive gauche[120]. A une date inconnue, on se préoccupa de protéger des faubourgs situés au nord et a l'est en construisant un second rempart qui vint s'appuyer sur le premier. Avec la même épaisseur de 1 m 50, son tracé affectait la forme d'un arc de cercle dont les extrémités seraient le bastion sud-est et une brèche (plutôt qu'une porte secondaire de la ville?) dans le premier rempart[121]. La faiblesse de la surface nouvellement protégée amène a se demander s'il ne s'agirait pas, non d'un nouveau quartier, mais de la protection [p. 466] d'un marché qui se serait tenu habituellement sous les murs de la ville. Aucun indice ne permet à ce jour de dater cette seconde enceinte. L'importance de l'ensemble permet de supposer une durée d'occupation de la ville nettement supérieure à celle que l'on attribue au fort de Castellum Dimmidi[122]. Elle a sans doute survécu à l'évacuation des troupes romaines. Seule une révision au sol, avec notamment une étude de la céramique, permettrait de progresser sur l'ensemble des périodes, non seulement romaine, mais aussi antérieures et postérieures.

 

3.4. – L'occupation romaine au sud-est de la Numidie (et au sud de la Césarienne)

 

L'ensemble des données recueillies sur ces trois sites amène à s'interroger sur deux points. Le premier est une notable différence des occupations romaines en Césarienne et en Numidie, avec pour corollaire le rattachement à cette dernière du contrôle de l'Atlas saharien pourtant au sud de la première. Le second est une interrogation sur la durée des différents dispositifs romains et sur le devenir des sites après leur évacuation par l'armée romaine.

 

3.5. – Établissement progressif de l'occupation romaine

 

L'établissement du dispositif romain a été très différent en Numidie et en Césarienne.

En Césarienne, l'occupation romaine semble s'être cantonnée longtemps aux villes de la côte et à quelques points comme Oppidum Novum. La vallée du Chélif et son prolongement jusqu'à Auzia reçurent des implantations importantes sous Hadrien. Une grande révolte sous Antonin le Pieux semble avoir soulevé les montagnes du Nord, et en conséquence consommé des ressources qui auraient pu être consacrées à la progression vers le sud[123]. [p. 467] Celle-ci n'intervint que sous Septime Sévère, qui fit aménager plus au sud une nova praetentura, opération complexe qui s'est déroulée de 198 à 203[124]. L'occupation romaine s'est arrêtée là[125].

En Numidie, l'occupation est allée plus vite, notamment après l'installation de la Legio III Augusta à Lambèse en 81 après J.-C. Une première poussée paraît avoir eu lieu sous Trajan. Pour G.-Ch. Picard en 1949, le limes de Minucius Natalis (légat de la IIIe légion d’Auguste, 104?-105 ap. J.-C.) se serait étendu sur une ligne Ad Speculum, Ad Medias, Ad Badias, Thabudeos, Vescera, Calceus Herculis, Thubunae et aurait protégé la totalité des territoires peuplés de sédentaires au sud et sud-ouest de l'Aurès. Gemellae fut occupée en 126[126].

La zone hachurée sur la carte de G.-Ch. Picard représenterait des terrains conquis pour la culture, donc au détriment des nomades[127], et protégés par la Seguia Bent el Krass établie sous Hadrien[128].

On note ainsi un décalage nord-sud de plus de 120 km entre les limites méridionales des deux provinces au milieu du IIe siècle[129]. L'armée de Numidie se trouva dès cette époque en contact [p. 468] avec des populations situées loin au sud de la partie romanisée de la Césarienne, alors limitée peu ou prou par la vallée du Chélif. C'est naturellement elle (et non l'armée de Césarienne) qui dut assurer la sécurité de la région. Compte tenu de ce que nous savons des conditions climatiques, pédologiques et hydrologiques, les populations devaient comporter des sédentaires, des transhumants et des semi-nomades, habitant les monts des Ouled Naïl et/ou les marges de ce massif. Il semble que Rome n'ait pas tenté d'occuper ces territoires, mais les ait simplement contrôlés en installant des détachements aux abords des principaux points d'eau, situés sur les principales routes traditionnelles de la transhumance, qui semblent d'ailleurs avoir changé depuis l'Antiquité[130]. On peut parler de véritables «antennes» projetées en avant de la Numidie[131]. Picard cite quatre routes partant du limes de Numidie: une piste par Gemellae, une piste vers Touggourt par le poste de Bir Djefeir, une piste par Dimmidi vers Laghouat (la «route du Sud»), enfin une «route du Nord», longeant au nord l'Atlas saharien, avec pour point de départ le poste de Medjedel, alors récemment découvert par L. Leschi. Le schéma semble rester valable à ce jour[132]. Il a [p. 469] même été précisé, à notre sens, en 1991 par P. Salama[133]. Nous allons nous intéresser aux deux routes «du Nord» et «du Sud», précisé que ces deux appellations se comprennent par rapport aux monts des Ouled Naïl, dont elles longent les faces méridionale et septentrionale, suivant une direction nord-est/sud-ouest[134].

 

3.6. – La «route du Nord»

 

La «route du Nord», encore hypothétique à l'époque de G.-Ch. Picard, passait par Bou Saada, Medjedel (où une cohorte est attestée en 149[135]) et Korirein pour aboutir à Agueneb, point de départ (et de retour) d'une expédition plus lointaine vers l'ouest en 174[136]. En 1991, P. Salama a ajouté à la documentation le plan et la dédicace d'un camp fondé par une cohorte (inconnue) à Hammam Charef[137] vers 142[138]. Ces points sont presque alignés sur le piémont Nord des Monts des Ouled Naïl. Il semble clair désormais que les principaux points d'eau de la route du nord ont été étroitement contrôlés par Rome dès Antonin le Pieux, c'est-à-dire d'un demi siècle avant l'occupation du balcon sud de la Maurétanie Césarienne au nord de la région des chotts[139].

[p. 472]

 

3.7. – La «route du Sud»

 

La «route du Sud», qui suit la face méridionale des Monts des Ouled Naïl, le long du Sahara, partait d'un point indéterminé près de la Seguia bent el Krass, passait par El Gahra, Aïn Rich et se dirigeait vers Castellum Dimmidi; le prolongement vers Ksar el Fedj et Laghouat reste plus hypothétique. Castellum Dimmidi a certainement été construit en 198[140], et il en est certainement de même des étapes qui y menaient, Aïn Rich[141] et El Gahra. Cette route, plus tardive que celle du nord, est d'époque sévérienne.

On note à son extrémité, à Castellum Dimmidi, une dédicace[142] par Anicius Faustus, légat de la IIIe Légion Auguste de 197 à 201[143], élevée par des soldats appartenant à deux unités différentes, des cavaliers d'une aile dont le nom a disparu et un détachement (vexillatio) de la troisième légion[144]. La raison de leur présence en ce lieu est précisé par le mot praetend[entem]. Comme l'a bien vu Carcopino[145], le verbe praetendere implique l'existence entre 198 et 201 d'une praetentura passant par Messad. Cependant le dispositif, constitué d'une sorte d'antenne projetée en avant du territoire romanisé, parait différent de la nova praetentura linéaire qui reliait à la même époque les nouveaux postes sévériens du sud de la Maurétanie césarienne.

Nous discernons donc une évolution sur la durée de ce dispositif. La voie de transhumance située au nord des Ouled Naïls a été contrôlée dès le règne d'Antonin le Pieux, tandis que celle du sud ne l'était que sous Septime Sévèrè[146].

[p. 474]

 

4. – Survie générale

 

La question se pose enfin de la durée de ces dispositifs. En Césarienne, on sait maintenant qu'il faut rejeter l'hypothèse de Courtois qui voyait des abandons de territoire à l'époque tétrarchique. Bien au contraire, la Tétrarchie reconquit des territoires perdus et assura la paix pour plus d'un demi-siècle. La nova praetentura sévérienne fut tenue au moins jusqu'à Julien[147]. Par la suite, la situation est moins bien connue, dans la mesure par exemple où Théodose l'Ancien ne semble pas avoir beaucoup abordé ce secteur pendant la répression de la révolte de Firmus en 373. Un point nouveau est la datation tardive, probablement byzantine, des tours rondes surimposées aux angles arrondis du camp sévérien d'Aras, qui constituerait l'un des points extrêmes de l'avancée byzantine dans les années 540, au delà de Zabi[148]. La plupart des sites sont encore attestés pendant le haut Moyen Age.

La situation au sud-ouest de la Numidie est moins claire. On considère généralement que le dispositif de contrôle de la transhumance projeté à partir de la Numidie au delà de la Seguia Bent el Krass a été abandonné avec Castellum Dimmidi dès les années 235-238. Mais tout ceci n'est fondé que sur des arguments a silentio (essentiellement l'absence d'inscriptions), mis en avant à une époque ou l'on ignorait presque tout de la céramique. Nous disposons d'éléments plus tardifs: du côté de la «route du Sud», Carcopino a signalé des monnaies du IVe siècle à El Gahra, Sadouri et entre Sadouri et Doucen[149]. Il est vrai que des monnaies ne garantissent pas une présence militaire. Il en va autrement sur la «route du Nord», à Medjedel: P. Salama a publié le plan d'un «fortin» carré de 22 à 25 m de côté pourvu aux quatre angles de bastions saillants en éventail, type qui n'apparaît pas avant la deuxième moitié du IIIe siècle. La date de 238, certes pratique, ne paraît plus s’imposer pour l'abandon de l'ensemble de ce dispositif de contrôle de la transhumance. Il n'est pas impossible qu'il ait en fait subsisté beaucoup plus tard (et pourquoi pas jusqu'au IVe siècle, voire jusqu'à la conquête vandale)[150].

[p. 475] Seules des prospections systématiques de ces sites fort peu visités depuis plus d'un demi-siècle pourraient permettre de se faire une idée précise. Nous débouchons donc sur plus de questions que de réponses, mais au fond c'est peut-être là notre lot d'historiens.

 

 

Annexe: Liste d'inscriptions découvertes à El Gahra

 

Référence

Contenu

Datation

1

Cagnat, 1904[151]

épitaphe de Iulius Maximus, miles leg. III Antoninianae

Caracalla (d'après le surnom de la légion)

2

CIL VIII, 18025[152]

dédicace au Dieu Soleil Invaincu Mithra, par Iulius Florus, centurio (plutôt que miles) de

la Legio III Aug, [...] us Pastor, décurion (et non signifer) de l'aile des Pannoniens, avec Pomponius Maximus, beneficiarius

Septime Sévère ou Caracalla[153]

3

CIL VIII, 8783

Dédicace à un empereur sévérien non identifié

?

4

CIL VIII, 8782 = 18018

Dédicace à la Fortune par L. Apronius Pius, légat de la 3e Légion Auguste

vers 225-226[154]

[p. 476] 5

Carcopino, 1925[155]

Milliaire d'Alexandre Sévère à 2 km au nord-est d'El Gahra

222-235

6

CIL VIII, 18026

Dédicace à Gordien III, par le numerus Palm[y]r[enor(um)]

238-244

7

CIL VIII, 18024[156]

Dédicace d'un autel deo sancto Malagbelo par [Macr ?]obius Secundus

238-244

8

CIL VIII,18027

Epitaphe d'un miles de la Legio III Augusta, dédiée par son épouse

 

9

Carcopino, 1925; Leschi 1936[157]

Epitaphe de Flavius For(tunatus ?), miles Leg. III Augustae

 

10

CIL VIII,18028

Fragment d’épitaphe s’un soldat de la Leg. III Aug.

 

11

CIL VIII, 8790

Epitaphe de Ulp(ia?) Faustin(a?) par son (mari?) m(iles?) le(g. ?)

 

12

Carcopino[158], 1924 et 1925

Epitaphe de Q. F(lavius) Un(icus?), eques Al(ae) Fl(aviae)[159]

 

13

CIL VIII 8784

Epitaphe de Valeria Pudentilla

 

14

CIL VIII 8785

Epitaphe de Calpurnius

 

15

CIL VIII, 8786

Epitaphe de Celsus

 

16

CIL VIII, 8787

Epitaphe de Iulia Turania, par son mari Aurelius Donatus

 

[p. 477] 17

CIL VIII, 8788

Epitaphe de Sosius Ianuarius

 

18

CIL VIII, 8789

Epitaphe de Tannia Fortuna

 

19

CIL VIII, 18029

Epitaphe de Elia Geta (?), à l’extrémité d’un caisson

 

20

CIL VIII, 18030

Epitaphe de Iulius Seleucus (?) par son épouse Antonia Fortunata

 

21

CIL VIII, 18031

Fragment d'épitaphe

 

22

CIL VIII, 18032

Epitaphe mutilée

 

23

CIL VIII, 18033   

Epitaphe difficilement lisible

 

24

CIL VIII, 18034   

Fragment d'épitaphe

 

25

CIL VIII, 18035

Fragment d'épitaphe

 

26

CIL VIII, 18036

Fragment d'épitaphe

 

27

CIL VIII, 18037

Fragment d'épitaphe

 

28

CIL VIII, 18038

Fragment d'épitaphe

 

29

CIL VIII, 8791

Fragment d'épitaphe

 

30

CIL VIII, 8792

Fragment d'épitaphe

 

31

Carcopino[160] 1924

Conductores Arruntius Martialis et Seia[nus] de suo fecerunt

 

 

 



 

[1] Voir ci-dessous, la situation de ces trois sites.

 

[2] AAA, XXIV, 155.

 

[3] Desrayaux, Description géographique et topographique des ruines d'Aïn Grimadi, «RAfr», 55, 1911, p. 473. Plus que de pillards, il pouvait s'agir de nomades et de transhumants dont les déplacements devaient être contrôlés.

 

[4] AAA, XXIV, 145, add., d'après la notice manuscrite de Desrayaux, publiée ensuite dans «RAfr», Description, cit., p. 474-5.

 

[5] Ibid.

 

[6] Ibid.; AAA, XXIV, 152.

 

[7] CIL VIII 20845 = Fix, «BAcH», 1887, p. 7. Ici, fig. 1, d'après le fac-simile par Bourjade, Notes cbronologiques, «RAfr», 32, 1888 (même dessin, dans Id., Notes pour servir à l'histoire de l'occupation française dans la région d’Aumale, 1891, p. 6, pl., fig. 3), d’après des croquis du lieutenant Deschamps, chef par interim de l'annexe de Sidi Aïssa en septembre 1887. Le lieu de la découverte a été indiqué par Bourjade, Notes chronologiques, cit., p. 246; cf. Desrayaux, Description, cit., p. 476, note 1.

 

[8] M. Christol, L'oeuvre de C. Octavius Pudens Caesius Honoratus en Marétanie Césarienne, in L’Africa romana X, p. 1141-52.

 

[9] P. Salama a fait remarquer à juste titre que la restitution «viaire» envisagée en note par Schmidt dans le CIL VIII ([via, prov. Maure]taniae Caesariensi, [longa incuria corruptas restituerunt]) n'était pas acceptable. P. Salama, Masque de parade et d’Aïn Grimidi, Maurétanie Césarienne, in Studien zu den Militärgrenzen Roms, III, 13. Internationalen Limeskongresses, Aalen 1983, Stuttgart 1986, p. 655 note 18. Nous ajouterons que la pierre ne ressemblait nullement à un milliaire.

 

[10] Le CIL VIII, 20846 (Aïn Touta) porte (ligne 5) les lettres …OPA…, à restituer soit propagatores, soit plutôt pro pace in provincia formule de l’inscription des hiberna de l'ala Sebastena à la Kherba des Ouled Hellal (P. Salama, Nouveaux témoignages de l'œuvre des Sévères dans la Maurétanie Césarienne, Ière partie, II) Construction des hiberna d'une unité auxiliaire en 201, «Libyca», I, 1953, p. 237-61 = AE, 1954, n° 143b). Le CIL VIII, 20847 (Boghar) porte encore (ligne 7) comme à Grimidi, la mention de la province avant le nom du gouverneur.

 

[11] P. Salama, Discussion, in Frontières et limites géographiques de l'Afrique Nord antique. Hommage à P. Salama: actes de la table ronde; Paris 2-3.5. 1997, Paris 1999, p. 108.

 

[12] M. Euzennat a fait remarquer que la politique d'expansion africaine de Septime Sévère s'arrête avec l'assassinat du tout puissant préfet du prétoire Plautien en 204-5. M. Euzennat, Recherches récentes sur la frontière d'Afrique, in Roman Frontier Studies, Proceedings of the International Congress, 10, 1974, p. 442-3, et 11, 1976, p. 537-9. Cf. A. R. Birley, Septime Severe; The African Emperor, London-New York 1971, p. 327-35.

 

[13] Salama, Discussion, cit., p. 108.

 

[14] P. Salama, Les déplacements successifs du limes en Maurétanie Césarienne (essai de synthèse), in Akten des II. Internationalen Limeskongresses, Budapest 1976, Budapest 1977, p. 577-95 N. Benseddik, Usinaza (Saneg): un nouveau témoignage de l'activité de P Aelius Peregrinus sur la praetentura sévérienne, in L'Africa romana IX, p. 425-37. Ead., P. Aelius Peregrinus Rogatus et la praetentura de Maurétanie Césarienne, in Frontières et limites, cit., p. 89-107.

 

[15] Maillefer, «RAfr», 2, 1857-58, p. 494 (simple mention de ruines romaines, non décrites).

 

[16] Le colonel Trumelet participait à cette époque à la lutte contre la révolte de Mokrani (février octobre 1871). Il séjourna à Grimidi du 15 juin au 4 août 1871, cf. P. Salama, Masque de parade et casque d'Aïn Grimidi: précisions sur le limes de Maurétanie centrale, «BSNAF», 1984, p. 133.

 

[17] Trumelet, «RAfr», 16, 1872, p. 79. Les débris de métal furent déposés au Musée d'Alger où plusieurs perdirent par la suite leur identité. J. Wierzejski, Musée d'Alger, Catalogue, Alger 1899, n° 581-589.

 

[18] Il prendra en 1887 le commandement de la subdivision de Bône.

 

[19] Rapport sur des travaux archéologiques du colonel Fix dans la subdivision d'Aumale, 1884-85, archives de l'Agence Nationale d'Archéologie, Alger, dossier Sour el Ghozlane. Ce document mériterait d'être publié intégralement. Quelques unes de ces fouilles ont été signalées: a) fouilles en 1885 à Chellala des Adaouara, Bourjade, Notes chronologiques, cit., p. 247-8, cf. J.-P. Laporte, Deux basilique, chrétiennes de Maurétanie Césarienne: Souk-el-Khemis (Galaxia) et Tarmount (Aras), «AntTard», 7, 1999, p. 382; b) travaux près du caravansérail d’Aïn Kermam situe près de la route d’Aumale à Bou Saada, par le maréchal-des-logis Bonely (amas de pierres de grandes dimensions dessinant un tombeau rectangulaire, fragment de crâne, tige en bronze, Bourjade, ibid., p. 245, note 1 et fig. 1); c) fouilles à El Gahra en 1889, cf. ci-dessus, p. 461.

 

[20] Voir ci-dessus, p. 441.

 

[21] Bourjade, Note chronologique, cit., p 246.

 

[22] F. De Cardaillac, «BSGAO», 1890, p. 165 (même texte que celui de Bourjade, en rajoutant quelques détails sur les objets trouvés: diverses lampes des IIIe et IVe siècles, et des casques, des masques, des pointes de lance, dont une grande partie a été donnée par le colonel Trumelet au Musée d'Alger.

 

[23] Rapport de 22 pages adressé le 31 mars 1905 par le lieutenant Desrayaux, adjoint de deuxième classe aux affaires indigènes, au capitaine chef de l'annexe de Sidi Aïssa, et transmis au Services des affaires indigènes du Gouvernement général par Bailloud, commandant la division d’Alger. Il doit s'agir de l'exemplaire aujourd’hui conservé dans les archives de l'Agence Nationale d'Archéologie, dossier Wilaya de M'sila. Je remercie M. Ghessab, directeur de l’Agence de m’avoir donné accès à ce document.

 

[24] AAA, XXIV, 155, add., d'après un exemplaire conserve alors dans les archives de la Commune mixte dont nous ne savons pas ce qu'il est devenu.

 

[25] Desrayaux, Description, cit., p. 471-83.

 

[26] Salama, Masque de parade; Maurétanie centrale, 1984, cit. p. 130-42. Id., Masque de parade, Maurétanie Césarienne, cit., p. 649-56.

 

[27] Sur l'umbo, l'un des casques (on ne sait pas ce que sont devenus les autres, peut-être très endommagés) et le masque d'exercice, restaurés en 1959 par le Laboratoire des métaux de Nancy, cf. P. Salama, art. cités à la note précédente; en dernier lieu, M. Feugère, J.-P. Laporte, Grimidi, in Algérie antique, catalogue d'exposition, Arles 2003, p. 106-7, n° 39-40.

 

[28] Voir ci-dessus, p. 442, note 17.

 

[29] Pour M. Feugère, les masques connus, masques d'exercice, et non de parade, étaient destinés à éviter que les officiers ne se blessent au visage an cours dei entraînements.

 

[30] La visière, séparée du casque depuis la restauration de 1959, a pu être remise à sa place exacte en 2003, grâce à la prise de radiographies lors de la restauration de l'objet a l'occasion de l'exposition Algérie Antique d'Arles.

 

[31] Les précautions oratoires posées «pour se mettre a l'abri d'un esprit hyper critique» par Y. Le Bohec, in Frontières et limites, cit. p. 125 (cf. également N. Benseddik, ibid., p. 95, n. 10) ne paraissent pas s’imposer dans la mesure ou le site e livré un masque et plusieurs casques Il faudrait imaginer que sont venus s'installer à Grimidi un vétéran collectionneur de casques, ou plusieurs retraites morts a Grimidi, mais ayant servi ailleurs en Césarienne, en Afrique du Nord ou même dans une autre province de l'Empire. La thèse d une implantation militaire est de toute manière renforcée par le signalement sui le site d’au moins un bâtiment dont le plan semble militaire.

 

[32] Salama, Masque de parade; Maurétanie centrale, 1984, cit., p. 140.

 

[33] J.-P. Laporte, Notes sur les camps de Tatilti et Aras (Maurétanie césarienne), in La hiérarchie (Rangordnung) de l'armée romaine sous le Haut Empire, in Congrès international sur l’Armée romaine, Lyon, septembre 1994, Lyon 1995, p. 343-6.

 

[34] L'essentiel provient de Desrayaux, qui précise lui-même (Description, cit., p. 473): «Les distances ont été mesurées su pas étalonné. J'ai obtenu l'orientation des éléments de la carte par des visées, prolongements et recoupements sommaires. Je n'ai fait des nivellements qu'une figuration grossière». Voir également l'imprécision sur les tours flanquant le fort; trop ruinées, elles n'ont pas été figurées sur le plan.

 

[35] Nous renvoyons pour le détail des descriptions à l'article de Desrayaux dans la «Revue Africaine» en nous concentrant ici sur l'essentiel pour notre propos.

 

[36] Desrayaux, Description, cit., p. 472: «J'ai vu aussi en cheminant que les bornes 1 et 2 km de la route de Sidi Aïssa à Chellala, tronçons de pierres de taille venues des ruines, portaient des inscriptions en belles lettres régulières de 8 cm de hauteur, mutilées la plus part le ciseau du tailleur la pierre.

 

[37] En 1905, des dalles en pierre, des lames de ciment et des traces d'un épais revêtement faisaient penser à un bassin, ou une chambre, précédant un long canal ou un abreuvoir.

 

[38] Desrayaux, Description, cit., p. 475.

 

[39] On comprend que les tours faisaient saillie par rapport à la courtine.

 

[40] Desrayaux, Description, cit., p. 477.

 

[41] Cf. J.-P. laporte, Rapidum, Le camp de la cohorte des Sardes en Maurétanie Césarienne, Ozieri 1989, p. 27, fig. 5, pour l’interprétation des restrictions successives de la ville. En revanche, une enceinte «secondaire» d'El Gahra (ci-dessus, p. 463 ss.), pourrait témoigner d'un agrandissement destiné à protéger un marché (?) tenu sous les murs principaux.

 

[42] CIL VIII, 20836 en 167 ap. J.-C.,cf. Laporte, Rapidum, cit., p. 239-41, n° 26.

 

[43] Cf. J.-P. Laporte, Deux basiliques chrétiennes, cit., 1999, p. 371-2.

 

[44] Site encore inconnu de l'Atlas Archéologique, fouillé en 1934-35 par P. Massiéra, dont le rapport très précis et complet fut publié, malheureusement sans les illustrations par M. Christofle, Rapport sur les travaux de fouille et des consolidation effectués en 1933-1936 par le Service des Monuments historiques de l’Algérie (1936), p. 273-93. Ce rapport imprimé a été analysé par J.-P. Laporte, Notes sur les camps d’Aras et de Tatilti, in Congrès international sur l'Armée romaine, cit., p. 349-66 pour les aspects militaires, et Id., Deux basiliques chrétiennes, cit., p. 371-82, pour les basiliques chrétiennes.

 

[45] Après un sondage préliminaire qui révéla la porte nord en juin 1933, les travaux durèrent du 23 décembre 1934 au 5 janvier 1935, avec seize ouvriers, puis du 22 décembre 1935 au 11 janvier 1936, avec vingt-cinq ouvriers, trente mètres de voie Decauville et deux bennes basculantes. L'épaisseur des remblais au dessus du sol initial atteignait 4 mètres pur endroits. Ce furent donc des travaux très importants.

 

[46] Laporte, Notes sur les camps, cit., p. 349-66. Pour 1'analyse détaillée des descriptions précises de Massiéra, nous renvoyons a cette publication.

 

[47] Archives de l'Agence Nationale d'Archéologie, dossier Wilaya de M'sila. Je remercie M. Ghessab, directeur de l'Agence Nationale d'Archéologie, de m'avoir donné accès à ce dossier. Il nous reste à retrouver les plans originaux qui pourraient donner des détails difficilement discernables sur les petits clichés.

 

[48] Clichés n° 63714 et 63715 de la Photothèque du Centre Camille Jullian, dont nous publions ici le second avec l'autorisation du Centre, que nous remercions.

 

[49] La dédicace découverte par Massiéra, apud Christofle, Rapport, cit., p. 290-1 a été commentée par Laporte, Notes sur les camps, cit., p. 350-1.

 

[50] Nous redonnons ici notre plan de 1994 après corrections, notamment sur l'emplacement et le contour des tours. Sur son plan général du Site, Massiéra n'avait indiqué le talon que pour les tours des portes et non pour les tours isolées. Nous l'indiquons pour notre part en traits pleins pour les tours A à G pour lesquelles Massiéra a dans le texte des indications précises. Les autres sont complétées en pointillé. Par ailleurs, il ne nous a pas été possible d'indiquer les petites salles aux murs épais de 40 à 50 cm adossées à la courtine, qui pourraient avoir supporté le chemin de ronde surélevé, signalées par Massiéra, apud Christofle, Rapport, cit., p. 279.

 

[51] Ibid., p. 281: la porte nord «ne comporte qu'un vestibule A, large de 3,95 m, profond de 2,95 m, en avant duquel se trouvait la porte, laissée ainsi sans protection antérieure. Cette porte était soutenue par des pieds-droits P1, dont les pierres terminales, taillées en corbeau, permettent de croire qu'ils supportaient moins un arc voûté qu'une forte poutre ou un linteau sous un arc de décharge On ne voit pas encore que les pieds-droit P2 aient pu servir de support à quelque chose». Les vestiges disparaissaient sous trois mètres de terre et Massiéra n'en a apparemment pas levé de plan.

 

[52] Ici, fig. 6, 2 et 3 (modifiées par rapport à la version 1994: Laporte, Notes sur les camps, cit., p. 365, fig. 6, porte ouest).

 

[53] Massiéra, apud Christofle, Rapport, cit., p. . 283. Un cliché conservé à Alger montre l'un de ces murs grossiers barrant le passage.

 

[54] Massiéra n'avait dessiné que les contours de la porte, nous avons rajouté les indications sur le mode de construction en interprétant tant le texte publié que les photographies.

 

[55] Massiéra, apud Christofle, Rapport, cit., p. 284-5.

 

[56] F. Kadra, Les djedars, Alger 1983, p. 43, 80-81 (djedar A) et 117 (djedar B).

 

[57] Laporte, Notes sur les camps, cit., p. 357-8, et 366, fig. 11 à 13 (dessins d'après Massiéra, apud Christofle, Rapport, cit., p. 287-88). Par chance, nous avions choisi la bonne localisation parmi les deux possibles.

 

[58] Massiéra, apud Christofle, Rapport, cit., p. 279- 80 («bastions»). Ici fig. 6,1 corrigée par rapport à la version 1994: Laporte, Notes sur les camps, cit., p. 256 et p. 365, fig. 9 (bastion D).

 

[59] Massiéra, apud Christofle, Rapport, cit., p. 280. Le sol de la pièce située à l'intérieur de la tour D était plus bas que le sol environnant; la différence était rattrapée par trois marches descendantes.

 

[60] Voir la liste et les références données par Laporte, Notes sur les camps, cit., p. 359-60.

 

[61] P. Salama, Bornes milliaires et problèmes stratégiques du Bas-Empire en Maurétanie, «CRAI», 1959, p. 346-354. Voir également un milliaire de la Medjana, à 75 km à l'ouest de Sétif, P. Salama, Une couronne solaire de l'empereur Julien, dans Acta of the Fifth International Congress of Greek and Latin Epigraphy, Cambridge 1967, p. 279-86.

 

[62] Actes de la conférence de Carthage, éd. S. Lancel, cf. t. IV, 1911, p. 1313, Arensis plebs. Il existait une autre ville de même nom en Numidie, avec également un évêque donatiste, près de Vatari (Fedj Siuda, AAA, XVIII, Souk Ahras, n° 478), cf. Lancel, ibid.

 

[63] Laporte, Deux basiliques chrétiennes, cit., t. 7, 1999, p. 371-82.

 

[64] Massiéra, apud Christofle, Rapport, cit., p. 279, qui précise: «Il semble bien que l'on doive admettre la présence de tours semblables aux trois autres angles, comme c'est le cas au camp voisin d'Aïn Meïerba, et comme paraît l'indiquer au sud-est une vue aérienne». Le camp d'Aïn Meïerba n'est pas mentionné par l'Atlas de Gsell. Il figure à 7,3 km à l'ouest-nord-ouest de Tarmount, sur la même courbe de niveau, sur un plan de la région dressé par Massiéra et dont une photographie a été conservée dans le même dossier que les plans du camp d'Aras.

 

[65] Pour la version 1994, cf. Laporte, Notes sur les camps, cit., p. 357 et 365, fig. 10)

 

[66] J.-P. Laporte, Zabi et Friki, «AntTard», 10, 2002, p. 155-6 et fig. 3 p. 155.

 

[67] N. Duval, Observations, «AntTard» 10, 2002 p 43.

 

[68] Laporte, Zabi et Friki, cit., p 152-6.

 

[69] Massiéra, apud Christofle, Rapport, cit., p. 289, Laporte, Deux basiliques chrétiennes, cit., p. 180 (sans dessin), Id, Notes sur les camps, cit., p. 157, fig 4.

 

[70] Duval., Observations, cit., p. 43 et fig. 1.

 

[71] Nous examinerons ailleurs cette identification nouvelle.

[72] Cessant de couler du S-O au N-E, l'oued Chair s'engage dans un couloir et se dirige pendant une dizaine de kilomètres de l'ouest à l'est, avant de reprendre la direction du Hodna après El Gahra.

[73] Les ruines d'El Gahra auraient livré de véritables stocks d'orge incendié, J. Carcopino, Le limes de Numidie et sa garda syrienne, «Syria», VI, 1925, p. 55.

[74] Nous nous rallions naturellement à la position de Gsell (AAA, XXIV, 1): «C'est sans raison sérieuse que Müller (édition de Ptolémée, notes aux p. 740 et 753) propose de placer à El Gahra Artagara, indiquée par Ptolémée dans la Libye intérieure».

[75] Bourjade, «RAfr», 32, 1888, p. 245 et note 1: sur les plateaux qui dominent la rive droite de l'oued Chaïr, à proximité du moulin de l'agha Ben-Dif et des ruines d'El Gahra, une très grande quantité de tombeaux anciens protohistoriques (le texte est un peu flou ci il pourrait s'agir, non de bazinas circulaires, mais d'amas de pierres comportant au centre des pierres de grandes dimensions placées verticalement ci dessinant un tombeau rectangulaire) et au milieu d'eux, un monument circulaire rappelant par sa forme les Menhir druidiques, composé d'énormes dalles fichées jointivement en terre ci formant une espèce d'enceinte de deux mètres environ de rayon. La hauteur des pierres au-dessus du sol est d'environ un mètre (cf. ibid., pl. entre les pages 248 et 249, 2).

 

[76] Nombreuses bazinas (parfois confondues avec des  «vigies», Lasalle, «BCTH», 1889, p. 395): en aval des ruines, sur un pic à l'est d'El Gahra (A. Reboud, Notice sur les ruines romaines de l’oued Chaïr, «RAfr», 9, 1886, p. 244) encore vues en 1985 (Rapport de mission dans la Wilaya de M'sila, du Ier au 30 novembre 1985, avec une photographie, par Mile Merazka Aïcha, Archives de l'Agence Nationale d'Archéologie, Alger).

 

[77] Cf. par exemple au sud de l’Aurès, P, Morizot, Tombes "proto-historiques" dans un camp romain du IIIe siècle a. D., in 4. Internationale Tagung über römerzeitliche Hügelgräber, Veszprem, Hongrie; 10-15/9/1996, «Balacaikoz», 5, 1997, p. 159-253.

 

[78] Carcopino, Le limes de Numidie, cit., p. 55 «La forteresse d'El Gahra […] en tout état de cause constituait a la fois une étape nécessaire sur la route de Messad, la base de son ravitaillement et le dépôt de ses effectifs».

 

[79] Voir ci-dessus, p. 475 7 pour la liste des inscriptions découvertes à El Gaha et dans les alentours.

 

[80] C'est sous Caracalla ou peut-être déjà sous Septime Sévère que les milles de la route menant à Sadouri et El Gahra ont commencé à être comptés non plus comme auparavant à partir de Lambèse mais a Calceo (El Kantara), J. Carcopino, Notes complémentaires sur les Numeri Syriens, «Syria», XIV, 1933, p. 36.

 

[81] Un numerus Palmyrenorum est attesté à El Kantara en 194-195 (Carcopino, Notes complémentaires, cit., p. 36). Il se subdivisait en une série de vexillations disposées jusqu'à El Gahra et à Messad, où leurs soldats s'installèrent sous Sévère Alexandre (CIL VIII, 7895, 18020), J. Carcopino, Sur l'extension de la domination romaine dans le Sahara de Numidie, «RA», 1924, II, p. 322.

 

[82] Carcopino, Le limes de Numidie, cit., p. 146: conductores Arruntius Martialis et Seia[nus] de suo fecerunt. L'inscription était incluse dans un ponceau antique (dont elle pouvait constituer la dédicace?).

 

[83] Carcopino, Notes complémentaires, cit., 23: «Divers indices qui ne trompent pas, et notamment l'abondance des trouvailles monétaires qui s'échelonnaient dans la vallée de l'oued Chaïr depuis Valérien jusqu'a' Galère, Constantin et Julien, m'avaient permis de conjecturer que pendant un siècle encore, à partir de Gordien III, toute la région ainsi limitée [par un limes tracé entre El Kantara et El Gahra] avait joui d'une prospérité économique qui eut été inconcevable sans la sécurité». Sans rejeter la remarque de Carcopino, notons toutefois que les indices cités sont minces.

 

[84] Capitaine Davenet, Extrait d'un itinéraire descriptif des régions méridionales de l'Algérie, «RAfr», 11, 1857-58, p. 288: «On trouve à Guehara une ruine romaine assez considérable. Son aspect semble indiquer un centre agricole de quelque importance, sui la rive droite d'un petit ravin, affluent de l'oued Chaïr. Sur l'autre rive, et dans une position assez dominante, on aperçoit les ruines d'un petit fort qui, sans doute, la protégeait. A cette hauteur, l'oued Chaïr a de l'eau courante. Il y a partout du tarfa [alfa?] en abondance». Fragments de deux inscriptions funéraires (CIL VIII 8787 et 8791).

 

[85] Reboud, Notice sur les ruines romaines de l'oued Chaïr, cit., p. 142-4.

 

[86] A. Reboud, Inscriptions des ruines romaines de l'oued Chaïr, «RAfr», 9, 1865, p. 174-9.

 

[87] A. Berbrugger, «RAfr», 9,1865, p. 179. «D'après un levé à "ne [non reproduit] des ruines de Kherbet-el-Gara fait par M. Baillod, sous-lieutenant au nie tirailleurs indigènes, l'établissement dessine un grand carré qui en contient douze autres dont le plus considérable, isolé sur trois cotés, parait être le réduit de l’ouvrage. Entre Ced el Gara (barrage de Gara) et cette espèce de camp antique est un mamelon couvert de pierres de taille qui touche presque à l'angle nord-est dudit camp».

 

[88] CIL VIII, 8782-8792.

 

[89] Voir ci-dessous, p. 443.

 

[90] Colonel Fix, «BAcH», 1887, p. 9-12. CIL VIII, 18024 à 18037.

 

[91] R. Cagnat (d'après le lieutenant Lassalle), Ruines de Kherbet-el-Gahra (Algérie), «BCTH», 1889, p. 393-5.

 

[92] St. Gsell, Enquête administrative sur les travaux hydrauliques anciens en Algérie, Alger 1902, p. 96.

 

[93] Commandant Toussaint, Résumé des reconnaissances exécutées par les officiers des brigades topographiques pendant la campagne 1902-1903, «BCTH», 1904, p. 129, simple mention dans la liste des sites vus dans la feuille d'Aïn Rich.

 

[94] R. Cagant, «BCTH», 1904, p. CLXI (revue par Carcopino, Sur l’extension, cit., 1924, p. 318) funéraire de Iulius Maximus, miles de la Legio III augusta.

 

[95] CIL VIII, supp., 18018, 18024-18038.

 

[96] AAA, XLVII, 1.

 

[97] R. CAGNAT, Armée romaine d’Afrique, 2e éd., Paris 1913, p. 603, avec la liste des unités attestées a El Gahra à cette époque. Il décrit le site (d'après lassalle, «BCTH», 1889) comme les restes d'une ville retranchée de basse époque où tout avait été bouleversé, mais qui témoignaient au moins de l'importance militaire de la position.

 

[98] Carcopino, Sur l'extension, cit., p. 318.

 

[99] Ibid., p. 3 i8: «une vraie ville forte, dont les ruines anonymes couvrent une superficie de 12 hectares. D'après mes évaluations sur le terrain, les ruines couvrent une superficie de 400 mètres de longueur sur 300 mètres de largeur environ». La date de la visite est donnée dans Carcopino, Le limes de Numidie, cit., p. 146: «Cette haute plaine, encore aujourd'hui fertile (Oued Chaïr signifie "rivière des orges") et où, le 28 avril 1924, quand je l'ai traversée, les orges déjà hautes ployaient au grand vent que souffle la steppe».

 

[100] Carcopino, Sur l'extension, cit., p. 319-20, qui n'en donne pas les textes. Seul le second fut publié l'année suivante.

 

[101] Ibid., p. 324.

 

[102] Carcopino, Le limes de Numidie, cit., p. 20-55 et 118-149 (p. 45-47: milliaire de Sévère Alexandre et plan du site; p. 49 et 52 funéraire d'un soldat de la Legio III Aug.).

 

[103] Ibid., p. 43-7.

[104] Ibid., p. 51-3 et 128-9.

[105] Ibid., p. 146.

[106] E. Albertini, Inscriptions d’El Kantara, «RAfr», 1931, p. 193-261, pour El Gahra, p. 255, 258.

 

[107] L. Leschi, Note sur des inscriptions romaines, «BCTH», 1936-37, p. 186-7, no 3, épitaphe de Flavius For(tunatus), miles leg. III Aug., déjà publiée en 1925 par Carcopino.

 

[108] G.-Ch. Picard, Castellum Dimmidi, Alger-Paris 1947, p. 49, 51, 52-4, 63, 83, 104, 108, n., 112, 113, 115, 120, 134.

 

[109] J. Baradez, Fossatum Africae, 1949, voir la table, p. 365.

 

[110] M. Le Glay, Saturne africain, Monuments, II, 1966, p. 195-200, mention de 4 stèles d'après Carcopino.

 

[111] E. Fentress, Numidia, «BAR», Int. Ser., Oxford 1979, p. 87, n. 10.

 

[112] Y. LE BOhEC, La Troisième Légion Auguste, Paris 1989, p. 435, 436, fig. 78, 455, 486, 540, 578.

 

[113] Nous ne savons pas interpréter directement deux interruptions dans le tracé du rempart en a et c (brèches, poternes?), dans la mesure où les textes ne signalent que quatre grandes portes.

 

[114] L'enceinte de Castellum Dimmidi n'englobait pour sa part qu'un demi-hectare.

 

[115] Fentress, Numidia, cit., p. 87.

 

[116] Les dimensions de ce bâtiment (6o x 3o m environ) se rapprochent de celles de l'enceinte militaire d'Aïn Grimidi (65 x 44 m), mais il peut s'agir d'une simple coïncidence.

 

[117] Le rapport de Lassalle mentionnait monnaies, fragments d'architecture et éléments sculptés très mutilés, dont Cagnat hélas n'a pas repris les descriptions dans Ruines de Kherbet-el-Gahra, cit.

 

[118] Reboud, Inscriptions, cit., p. 178.

 

[119] St. Gsell, Enquête administrative sur les travaux hydrauliques anciens en Algérie, Paris 1902, p. 96.

 

[120] Reboud, Notice, cit., p. 144.

 

[121] Suite peut-être a une maladresse de dessin, l'extrémité ouest du second rempart semble pénétrer a l'intérieur de la première enceinte. Comme bien d'autres, point devrait être vérifié au sol.

 

[122] Occupation en 198, abandon en 238, d'après Picard, Castellum Dimmidi, cit., passim. Cf. Encyclopédie berbère, s.v. Dimmidi [Y. Le Bohec], XV, 1995, p. 245-9; Id., Une inscription inédite du Castellum Dimmidi, in L'Africa romana XII, p. 1101-5.

 

[123] Nous distinguons la souveraineté, qui, héritée du royaume de Juba II, devait s'étendre fort loin, et l'occupation et/ou romanisation effectives, très limitées au départ et dont le développement n'a été que progressif.

 

[124] Voir ci-dessus p. 442, note 14, à propos de l’œuvre de C. Octavius Pudens et de P. Aelius Peregrinus en Césarienne.

 

[125] Nous sommes d'accord avec Picard (Castellunm Dimmidi, cit., p. 52, qui cite lui-même Massiéra, IIe Congrès de la Fédération des Sociétés Savantes d'Afrique du Nord, 1934, II, p. 503-6): le limes (en fait la nova praetentura de Césarienne) est toujours resté au nord et à l'est du Hodna, la plus grande partie de la province n'ayant pas dépassé la ligne Usinaza-Zabi qui se raccordait à Tubunae avec le limes numide de Minucius Natalis.

 

[126] J. Baradez, Compléments inédits au Fossatunm Africae, dans VIe Congrès international d'Etudes des Frontières romaines, Köln-Graz 1967, p. 200-210; Id., Gemellae et Mersafelta, in Mélanges Carcopino, Paris 1966, p. 61-2.

 

[127] Il est clair cependant que seule une petite partie des terrains, ceux qui pouvaient être irrigués, pouvaient être mis en culture. D'autre part, comme le rappelait naguère J. Guey, Le limes romain de Numidie et le Sahara au IVe siècle, «MEFR», 56, 1939, p. 3, les terrains de passage redevenaient libres après la récolte de l'orge en mai. La barrière n'avait donc nul besoin d'être étanche en permanente.

 

[128] Le Bohec, La Troisième Légion, cit., p. 370-1. La reconnaissance du caractère militaire, et non hydraulique, de la Seguia Bent el Krass est due à Gsell, Enquête administrative, cit., p. 142, n. 1: «Nous croyons qu'elle était surtout, et peut-être exclusivement, un fossé défensif marquant la limite du territoire romain».

 

[129] L'attribution su règne d'Hadrien d'une communication directe Gemellae – Rapidum passant par Sadouri (Baradez, Fossatum, 1949, p. 353-354) ne paraît reposer sur aucun indice et aucune nécessité précise. Le tracé Gemellae-Grimidi a sans doute été suivi par une route, dont Baradez a vu les traces, mais il est douteux qu'elle se soit dirigée sous Hadrien droit vers Rapidum, localité très secondaire, en ignorant superbement Auzia, l'une des principales villes de la Césarienne. La reconstitution paraît historiquement hasardeuse, et cette route ne se justifierait guère avant l'établissement de la nova praetentura sévérienne qu'elle aurait reliée au sud-ouest de la Numidie.

 

[130] Cf. Salama, Les déplacements, cit., p. 579: «Les fortifications des passes de l'Atlas saharien occidental, avec les postes de Dimmidi, Aïn Rich et El Gahra ne peuvent se comprendre par l'étude des transhumances modernes. Les voies d'invasion ont changé. Celle de la trouée du Hodna subsiste encore; celles de l'Atlas saharien se sont éteintes; on les reconstitue aisément par les positions des garnisons romaines qui trahissent l'existence de courants migratoires au long cours, venus des hauts plateaux oranais. du Djebel Amour, des monts des Ouled Naïls, du Sahara de Laghouat».

 

[131] Sur des itinéraires occupés et d'autres simplement contrôlés, cf. R. Rebuffat, Au delà des camps romains d'Afrique mineure, in ANRW X, 2, 1982, p. 474-513. Ici, le contrôle portait non sur un itinéraire joignant deux provinces romaines mais sur une (puis deux) route(s) projetée(s) en avant de la Numidie, pour canaliser les nomades et/ou les transhumants qui venaient périodiquement faire paitre leurs troupeaux sur son territoire.

 

[132] En revanche, nous ne sommes guère sensible au subtil distinguo introduit par Picard, Castellum Dimmidi, cit., p. 51: le secteur Aïn Nimia (centenarium Aqua Viva)-El Gahra aurait été contrôlé par les Romains entre 193 et 198; la transformation en route empierrée (?) de la piste d'El Gahra serait postérieure à 218. C'est sans doute faire parler beaucoup des documents peu nombreux.

 

[133] P. Salama, Quelques incursions dans la zone occidentale du limes de Numidie, «AntAfr», 27, 1991, p. 93-105.

 

[134] Des traces romaines sont même attestées bien au delà des Ouled Naïls, dans la même direction (vers le sud-ouest). P. Morizot, Le présence romaine dans le Djebel Amour, in Frontières et limites, cit., 1999, p. 185-212, souligne que relief et forêts font du Djebel Amour avant tout une montagne de pasteurs transhumants et de nomades sahariens.

 

[135] L. Leschi, Medjedel, «BCTH», 1938-40, p. 162-165 (= Etui/ci d'Epigraphie d'Archéologie et d'Histoire Africaines, 1957, p. 45-46). Dédicace datable de 149 par une cohorte dont le nom a disparu. Cf le plan schématique d'une forteresse antique en grandes pierres de taille (de la seconde moitié du IIIe siècle?) donné par Salama, Quelques incursions, cit., 27, 1991, p. 96.

 

[136] CIL VIII 21567. Voir le commentaire détaillé par Picard, Castellum Dimmidi, cit., p. 58-60. Sur le site, cf. Morizot, Le présence romaine, cit., p. 193-4.

 

[137] AAA, XLVI, 41. Salama, Quelques incursions, cit., p. 97-105.

 

[138] Salama, Quelques incursions, cit., p. 103: fragment de dédicace impériale attribuable avec une bonne probabilité au règne d'Antonio le Pieux.

 

[139] Le règne d'Antonin le Pieux est marqué en Césarienne par une grande révolte montagnarde, essentiellement le long de la côte qui ne devait guère laisser loisir pour l'agrandissement du territoire vers le sud.

 

[140] Picard, Castellum Dimmidi, cit., p. 84 ss.

 

[141] AAA, XLVII, 8. Sur le site, a été découverte une liste de cavaliers de l'Ala Flavia Severiana (CIL VIII 8793 et 18019 = «BCTH», 1892, 87), que Gsell a datée de 227 après J.-C. Cf. également P. Wuilleumier, «BCTH» 1928-29, p. 294-6.

 

[142] CIL VIII, 8796, au Musée d'Alger. Picard, Castellum Dimmidi, cit., p. 89 et 103.

 

[143] Le Bohec, La Troisième Légion, cit., p. 126.

 

[144] En toute logique, ceci devrait amener à remettre en cause la théorie implicite suivant laquelle les auxiliaires ont succédé aux légionnaires dans l'occupation de ces postes. Ils y étaient sans doute en même temps qu'eux auparavant et y sont restés lorsque la Légion a été dissoute. La constitution d'une garnison par réunion de détachements de plusieurs corps, juxtaposant légionnaires et auxiliaires est une pratique intéressante.

 

[145] Carcopino, Le limes de Numidie, cit., p. 54.

 

[146] Nous retrouvons ainsi une idée de Salama, Le déplacements, cit., p. 580: «Les Antonins préparèrent au nord de l'Atlas saharien un symétrique que Septime Sévère devait doubler [...] su Sud du même massif par la ligne avancée Dimmidi-Aïn Rich-El Gahra».

 

[147] laporte, Note sur les camps, cit., p. 360.

 

[148] Laporte, Zabi et Friki, cit., p. 151-6.

 

[149] Carcopino, Le limes de Numidie, cit., p. 45.

 

[150] Malgré la faiblesse des indices, essentiellement numismatiques, nous sommes tentés de rejoindre J. Carcopino qui estimait que, même destituée de sa garnison, la frontière de Rome n'a pas cessé pendant le IVe siècle de tenir à l'abri de ses retranchements et de ses castella, Carcopino, Le limes de Numidie, cit., p. 145. Dans le même sens, Guey, Notes sur le limes romain de Numidie et le Sahara au IVe siècle, «MEFR», 56, 1939, p. 209. Nous ajouterons qu'en 423, le comte Boniface assurait encore la défense du bassin du Hodna, Saint Augustin, Ep. CCX, 3, 12.

 

[151] CAGNAT, «BCTH», 1904, p. CLXI. Relue et complétée par CARCOPINO, Le limes de Numidie, cit., p. 52, n° 4. Cf. Leglay, Saturne Africain, Monuments, p. 200, n° 1.

 

[152] Inscription déposée au Bureau de Bou Saada. Lecture corrigée par Cagnat, «BCTH», 1904, p. CLXI. LE BOHEC, La Troisième Légion, cit., p. 176, n. 217.

 

[153] LE BOHEC, La Troisième Légion, cit., p. 176 et 239. Le même lulius Florus semble être attesté comme optio sur une liste de Lambèse, CIL VIII, 2559 et 18048d, e peut-être plus tard comme vétéran.

 

[154] Pour les dates de la légation de L. Apronius Pius, cf. LE BOHEC, La Troisième Légion, cit., p. 126.

 

[155] CARCOPINO, Sur l'extension, cit., p. 319-320, qui n'en donne pas le texte. CARCOPINO, Le limes de Numidie, cit., p. 45-7.

 

[156] LE BOHEC, La Troisième Légion, cit., p. 486.

 

[157] CARCOPINO, Le limes de Numidie, cit., p. 128, n. 3. L. LESCHI, Note sur des inscriptions romaines, «BCTH», 1936-37, p. 186-7, n° 3 (qui la croyait inédite).

 

[158] CARCOPINO, Sur l'extension, cit., p. 321, simple mention sans le texte, édité l'année suivante, Id., Le limes de Numidie, cit., p. 128-9.

 

[159] L'Ala Flavia est mentionnée à AÏN RICH (AAA, XLVII, 8), voir ci-dessus, p. 472, note 141.

 

[160] CARCOPINO, Sur l'extension, cit., p. 324. Inscription découverte à 2 km au nord-ouest d'El Gahra, sur le rebord d'un ponceau antique jeté sur un affluent desséché de l'oued Chaïr.