Université Montpellier
I
Auguste et la puissance tribunicienne
Sommaire: I. 1. L’attribution
de la tribunicia potestas
(T.P.) à Auguste (a. 23 av. J.-C.). - 2. Problèmes posés par la
T.P. d’Auguste. - 3. La
toute-puissance de la théorie de la compensation (civile). - 4. Concentration des pouvoirs et hyper-criticisme. - 5. Renouveau de la ligne
fidéiste. Insuffisance. - 6. Ouverture de la question (pour son possible
renouvellement). - 7. Négligence d’un aspect monumental évident. - II. 8. Retour sur les
origines du tribunat de la plèbe : débiteurs plébéiens/usuriers patriciens. - 9. La crise du tribunat de la
plèbe (à l’intérieur de celle de la Respublica). - 10. La solution à la
crise : Auguste (23-14). - 11. Qualités nouvelles (impériales) de la T.P. - 12. Continuité
(nécessaire) de la garantie tribunicienne. - 13. Limitation
par Auguste, conformément à la tradition romaine, du capitalisme financier. - 14. Le principe de la défense
impériale des débiteurs jusqu’à Justinien; sa déconnexion en doctrine d’avec la
T.P. – 15. Note
Bibliographique. – Abstract.
I
Les sources à
disposition[1]
ne laissent que peu de doutes sur plusieurs points : 1° c’est en 23 qu’Auguste
reçoit la pleine puissance tribunicienne, la tribunicia
potestas; 2° elle lui sera remise 37 fois jusqu’à
sa mort en 14; 3 ce mécanisme de collation (renouvellement annuel de type
républicain) est «doublé» par une attribution à vie, perpétuelle, de la T.P.
Techniquement, Auguste, patricien, n’est pas tribun (tribunus
plebis) : son pouvoir (la tribunicia
potestas) est détaché de l’ancienne
«magistrature» plébéienne (le tribunat: sans auspices ni imperium). Le
faisceau de pouvoirs traditionnellement attachés à la T.P. (v. infra)
est à Rome d’une importance considérable depuis la création du tribunat suite à
la sécession de la plèbe (493), quand bien même ces pouvoirs ne s’exercent que
dans la ville: «leur tâche principale [aux tribuns de la plèbe] est de protéger
la plèbe, et pour ce faire ils disposent de la puissance tribunicienne (tribunicia potestas):
ils sont inviolables (sacrosanctitas), et
quiconque porte la main sur eux est maudit (sacer),
ses biens confisqués et remis au temple plébéien de Cérès» (Lamboley 1995, 361). Enfin il est
important de relever (à l’intérieur de la question du fondement juridique du
pouvoir) que l’attribution de la T.P. à Auguste a partie liée avec son
abdication du Consulat en 23 (perte de l’usage domi
de l’imperium consulaire réitéré chaque année depuis le 31; exercice par conséquent seulement pro consule de
l’imperium, sans limite de temps ni d’espace). Précisons:
dans les deux cas (T.P./Consulat), l’autorité est exclusivement civile et
limitée territorialement (Rome pour la T. P.; l’Italie et Rome pour le
Consulat). En ce sens (civil), la question de l’imperium proconsulaire
(militaire) d’Auguste est voisine mais néanmoins distincte de celle de sa T.P[2].
Les difficultés
rencontrées par la doctrine sont grosso modo de trois ordres (perméables entre eux:
c’est la question générale de la qualification du régime); 1° la technique
juridique : quels rapports entre la T.P. et l’imperium (évolutif),
entre les collations annuelle et perpétuelle de la T.P., entre l’obtention de
la pleine T.P. et l’attribution précédente, en 36, de la (seule) sacrosainteté tribunicienne (rendant la personne d’Octave
inviolable comme s’il était tribun) ainsi que du droit de s’asseoir sur les
bancs des tribuns (sacrosanctitas; ius subselli),
etc.? ; 2° l’idéologie politique : ainsi signalé défenseur de la plèbe
(par la T.P., la sacrosainteté, le banc…), Auguste,
qui incarne par ailleurs le principe de l’imperium du magistrat,
annule-t-il la dialectique institutionnelle de la République patricio-plébéienne (aspects positifs et négatifs de la
« souveraineté » : gouvernement et défense) ou, au contraire,
tout en la modifiant, la renouvelle-t-il ? 3° l’histoire sociale enfin :
car Auguste, « champion » de la Plèbe de par son positionnement
institutionnel (Mommsen 1896, p.
150 du vol. V avait considéré que la T.P. est la clé d’entrée sociale de la
solution dyarchique prince/sénat, le principat étant un organe de tutelle, de
protection de la plèbe – son Palladium), est censé défendre les intérêts
de la plèbe contre les «puissants»[3].
On peut dire que la
question de la T.P. d’Auguste est le plus souvent, dans la doctrine
contemporaine, comme hypothéquée par l’intelligence « constitutionnelle »
du procédé de 23 : l’octroi de la T.P (incluant notamment le ius agendi cum senatu et le ius agendi cum plebe) pallie
effectivement l’abdication du Consulat la même année[4].
Ce serait là la finalité première, technique, de cette nouveauté (nouveauté
annoncée, sinon préparée, dès 36 par la collation de la sacrosainteté
et peut-être aussi, depuis 30, du ius auxilii classique aux tribuns : voir Syme 1978, 319). Reconnaître ainsi
unanimement la T.P. comme «base civile» des pouvoirs
augustéens ainsi réorganisés (si ce n’est renforcés) n’empêche donc pas, assez
paradoxalement, de faire passer au second plan la T.P. dans son principe
premier (la défense de la plèbe). Dans cette optique assez formaliste, on
reconnait presque incidemment que «la puissance tribunicienne permettait bien
sûr aussi à Auguste d’apparaître comme le défenseur de la plèbe» (Ferrary 2001, 117)[5].
Une relégation de la défense plébéienne qui rend en outre son évocation
extrêmement concise dans les manuels. Ainsi Humbert
1999, p. 368 qui, il est vrai, en résume parfaitement l’idée principale :
«la puissance tribunicienne rassure par sa vocation populaire et démocratique; elle équilibre un pouvoir jusque-là surtout
militaire ».
Cette relative
étroitesse dans l’analyse juridique de la T.P. d’Auguste est enfin conditionnée
(même par réaction) par la méthode hypercritique : la
« concentration » des pouvoirs dans la personne d’Auguste (entreprise
légitime du fait de la faiblesse de la République partagée entre un Sénat
impuissant et des promagistrats rivaux), rendrait difficile de considérer
sérieusement la soi-disant « restauration » de la République (d’où
les solutions fonctionnelles de « façade», d’« apparence », de
« fiction » républicaines voire de « simple hypocrisie
extérieure ») et, c’est lié, le vieil idéal de la défense plébéienne
nouvellement incarnée. Aussi, mieux vaudrait s’en tenir à l’étude de la partie
la plus neutre et la plus « crédible » du système, c’est-à-dire à la
forme juridique (qui fut recherchée habilement par Auguste et ses «ingénieurs»): car les remèdes à la faiblesse ne pouvaient
s’inscrire que dans les cadres juridiques de la tradition romaine, non dans le
principe royal (en raison de l’opposition structurelle entre libera Respublica et Regnum).
Finalement, on serait fondé à n’investiguer que la technique juridique pure,
isolée du reste, notamment de l’histoire politique et sociale des concepts (Begriffsgeschichte). Dernier argument pour ce
retour à un état pré-mommsénien des études : la T.P.
d’Auguste serait de toute façon peu compatible avec celle des anciens tribuns
de la plèbe du fait et de la nouvelle dissociation, inspirée de César[6],
entre la T.P. et le tribunat et, c’est connexe, en raison de la fin des limites
traditionnelles de la magistrature plébéienne: sans collègue, il est à l’abri
de toute intercession!
Dans sa récente édition
de la source officielle d’inspiration augustéenne que sont les Res gestae Divi Augusti, J. Scheid 2007, p. XL-LX a pourtant
redonné force à l’hypothèse de la restauration de la liberté du peuple romain
et du gouvernement de la République (ligne de Jones
1951, 112-119, Grenade 1961, dès
la p. VI ; déjà Mommsen 1896, 6-7
pour qui l’empereur reste un magistrat de la tradition républicaine[7])
: ce serait dans ce contexte général qu’il faudrait comprendre les pouvoirs
exceptionnels du prince. Les Res gestae ne diraient que la vérité en soulignant
notamment la justice d’Auguste (charges publiques traditionnelles,
collégialité, investiture par la loi, légalisme, respect de la coutume, de la
propriété privée et plus généralement du droit) et sa piété (relation aux
dieux, aux parents, à la patrie… à la plèbe). Ainsi devrait aussi s’analyser la
T.P. de 23 (en vertu de laquelle il va exercer les pouvoirs civils) : «un pouvoir qui est détaché de la magistrature proprement
dite, ce qui est nouveau, mais ne constitue pas une nouveauté absolue, puisque
le pouvoir remonte à une vieille magistrature, le tribunat de la plèbe. Auguste
et ses conseillers ont ouvert une nouvelle page dans l’histoire du tribunat de
la plèbe, dont le pouvoir, après avoir conservé uniquement la plèbe de Rome [plebs], a fini par former la base civile [civitas] des pouvoirs de l’empereur».
Certes! Mais ne retombe-t-on pas alors, même relevée
toute «l’importance de ce pouvoir dans la politique
d’Auguste», dans la théorie de la compensation civile avec finalement, ce qui
lui est accessoire, une T.P. augustéenne essentiellement disjointe de
l’idéologie (et de la technique) de la défense plébéienne ? Autrement exprimé :
la défense plébéienne (qui, c’est sûr, fonde idéologiquement la force attachée
à la T.P.) aurait essentiellement disparu sous l’ingénierie institutionnelle,
sous le génie d’Auguste et de ses collaborateurs – comme sacrifiée sur l’autel
(aplatissant) de la «base civile» suite à l’abdication du Consulat[8].
Un renouveau dans l’étude
de la T.P. d’Auguste doit certainement partir d’une remarque de méthode
formulée en 1962 par F. de Martino (Histoire de la constitution
romaine IV.1, 238), remarque qui, paradoxalement, ne contraste pas avec
l’ancienne valorisation de la T.P. par Mommsen
(reprise par Kunkel 1958, 340
pour qui la T.P. d’Auguste est d’une importance fondamentale en ce qu’elle
implique l’auxilium au service de la défense
des particuliers). Rappelons les termes précis du savant italien:
«la plus grande difficulté tient au fait que les évènements réels n’obéissent
pas toujours à nos schémas; cela ne doit pas induire [pour l’interprète] une
solution négative et sceptique, laquelle finit par ôter toute valeur aux
définitions et aux formes extérieures d’un régime. Pour les Romains, cela était
peut-être encore plus important parce qu’ils ne considéraient jamais la forme
comme une pure apparence mais toujours comme la manière d’être d’une substance
juridique et politique déterminée» (Chap. XIII: «La
définition du principat d’Auguste» – § 2: «Positionnement du problème»). Il
semble bien que cette tendance moderne à «isoler» les
problèmes les uns des autres ait été conservée, sinon développée par la
doctrine la plus récente. De là le recours à la fiction et, c’est lié,
l’isolement contemporain (très certainement inédit aux Romains eux-mêmes) entre
la T.P. d’Auguste et le principe général de la défense impériale de la plèbe:
un isolement méthodologique qui finit par suggérer, même tacitement, la
disparition dès 23 de l’aspect négatif de la «souveraineté» (la défense :
la potestas du tribun) sous l’aspect
positif de celle-ci (le gouvernement : l’imperium du magistrat) –
avec finalement l’idée sous-jacente d’un dépassement du dualisme romain des
pouvoirs[9].
Confronté à ce relatif
scepticisme de l’historiographie juridique sur la T.P. d’Auguste (défiance dont
Jean Gaudemet a certainement vu la raison profonde: «mal définie, cette puissance n’en est que plus
considérable»), on se proposera ici de poser quelques jalons pour une
reconsidération du sujet en grand. Car on ne peut douter qu’il y ait eu
une recherche du monumental dans le principe «tribuno-impérial» inauguré par Auguste. Et ce à
trois niveau: 1° longue période (de la secessio
plebis de 494 à 23 et après); 2° grand espace
(Auguste n’étant pas tribun, la T.P. de l’empereur est étendue aux provinces);
3° point fort, «culminant» écrira Tacite – le «summi
fastigii vocabulum» –
pour exprimer et justifier la prééminence d’Auguste sur les autres pouvoirs
dans la cité (imperia), lui qui n’est ni roi
ni dictateur[10]:
la fonction protectrice impériale (fonction qui donne un éclairage juridique au
«fondement social du pouvoir» d’Auguste valorisé depuis de Martino). De là peut-être la reformulation de la question
que doit nous poser – à nous Modernes – la T.P. d’un Auguste sacrosaint
(il est intouchable) et quasi-tribun de la plèbe (il occupe le banc des
tribuns)[11] :
la défense (équitable) des intérêts de la plèbe à l’intérieur de la plus grande
protection (conservatrice) de la République patricio-plébéienne
? Question qui, idéalement, devrait être traitée avec la même amplitude de vue
qu’un J.-B. Vico dans sa «philosophie de l’histoire» du droit romain, à l’aune
notamment de cette trame qu’est le passage à Rome de l’équité civile à l’équité
naturelle (v. La science nouvelle, 1725).
II
Repartons donc de
considérations simples, assurées par les sources antiques et nous replaçant
efficacement dans l’ancien droit romain privé de l’esclavage pour dette (le
fameux contrat de nexum): «en l’an 494 av.
J.-C., la plèbe romaine en armes, sous la conduite de Caius Sicinius
Bellutus, fait sécession sur le Mont Sacré à cause de
l’aggravation du conflit qui l’oppose à la classe dominante des patriciens dans
tous les champs de la vie en commun et, tout particulièrement, la question de
la dette : les débiteurs [qui sont obligés, «liés» personnellement: les nexi] sont opprimés de façon intolérable par les
usuriers (foeneratores). L’année suivante, la
plèbe romaine rentrera à Rome, convaincue par Menenius
Agrippa de la nécessité d’une collaboration entre les divers groupes sociaux,
mais seulement après avoir créé une magistrature nouvelle, un “magistrat plébéien”,
doté d’une protection nouvelle (la sacratio
capitis de quiconque l’offense) et d’un pouvoir
tout autant nouveau: de par sa configuration générale (la potestas
sacrosancta), son fondement (le iusiurandum collectif plébéien, intégré –
donc – à un foedus patrico-plébéien),
son contenu (le ius intercessionis
contre les magistratures patriciennes/de gouvernement et le ius agendi cum plebe). C’est le tribunat de la plèbe»
(Catalano-Lobrano, 2007).
On sait que le tribunat
va occuper une place extraordinaire dans le système juridique républicain. A tel point qu’au premier siècle, Cicéron, en pleine crise
de la République, rappelle aux Romains dans son traité Des lois (III.
7-10) que, sans l’opposition du tribunat au consulat, il n’y a pas de
République – mais le gouvernement d’un « roi » (qui peut bien
s’appeler « consul » : le pouvoir (res)
est conservé dans la même espèce)[12]. Et parce qu’il est conscient des vices
(historiques) du tribunat – ou plus exactement des tribuns eux-mêmes que la
République n’a pu repousser que par le fer (expression qu’emploie Quintus dans
le dialogue) – Cicéron, en lutte contre la crise historique du tribunat,
remémore à ses compatriotes la nature juridique de l’institution en son
mécanisme et essence première : la tempérance de la République. De là la
remarquable réponse de Marcus à Quintus[13] : « Admire en cette matière la
sagesse de nos ancêtres. Ils accordent à la plèbe ce
pouvoir, les armes tombent, la sédition s’apaise […]. Car la plèbe
qui a son droit reconnu n’engage pas de luttes mettant la République en péril.
Ou bien donc il ne fallait pas chasser les rois, ou bien il faut donner à la
plèbe une liberté réelle, et non pas en paroles seulement ; elle lui a été
donnée de telle façon qu’elle a écouté beaucoup d’hommes éminents et s’est
inclinée devant l’autorité des premiers citoyens ».
Auguste, qui résout la
crise républicaine (guerres civiles) en reprenant
la réflexion cicéronienne, édifie l’institution du prince sur deux piliers
républicains : l’imperium proconsulare (incomparable
du fait de son auctoritas) et la T.P. sacrosancta : ces deux piliers, « c’était
la Révolution même — l’Armée et le peuple » écrit Syme dans son célèbre ouvrage de 1939 : The Roman
Revolution (trad. fr.
1978, 319). Mais on oublie généralement qu’il règle, par la même occasion (en
réunissant l’imperium jupitérien de qui commande à la potestas, elle aussi jupitérienne, de qui défend),
la crise spécifique au tribunat : et ce, par et en sa propre personne (cf. De Visscher 1949, 3 et sq.). En somme,
la «concentration» des pouvoirs en la personne du
prince, avec en première ligne la T.P. sainte et sacrée, n’est pas un problème
qui empêcherait de prendre au sérieux cette dernière (l’obstacle dogmatique
tient certainement à l’opposition constitutionnelle moderne, libérale, entre
concentration et séparation des pouvoirs). Bien au contraire, c’est la
solution ! Une solution qui, dégageant la T.P. de traditionnelles
conditions (être tribun) et limites (avoir des collègues), permet une modalité
nouvelle, princière, d’assurer la continuité dans la cité du principe bipolaire
républicain. En ce sens, il n’est pas sans logique que la T.P. d’Auguste,
renouvelée automatiquement chaque année, ait servi à marquer les années d’un
principat censé restaurer, restituer la Respublica
(l’empereur est mort en 14 dans sa 37e T.P.).
Unifiée personnellement
à l’imperium, la T.P. (et par corrélation la défense de la
plèbe) gagne inévitablement : 1° en force (reliée qu’elle est au pouvoir
de commandement); 2° en universalité (Humbert 1999, 368: «la puissance
tribunicienne augustéenne, extra-territoriale, a une
vocation universelle. Tous les citoyens de l’empire trouvent un refuge dans sa protection»); 3° en re-sacralisation
(autre aspect de la restauration de la République par un homme divinisé). Ces
trois aspects de la T.P. princière (force, universalité, sacralité) participent
donc d’une réformation aboutie du tribunat de la plèbe lui-même;
plus encore, d’un dépassement dans la continuité.
A l’époque républicaine (v. précédemment Cicéron),
la figure du tribun est là pour garantir que, du point de vue du système, le populus Romanus soit
bien en relation de commandement/obéissance avec lui-même et ce, à travers le
pouvoir de gouvernement des magistrats qui, comme des commissaires, lui sont
soumis (in potestate). Aussi, «la sacrosancta potestas des
tribuni plebis
est [-elle] garante [et] de la liberté des singuliers cives face au
pouvoir de gouvernement des magistrats patriciens et, en même temps et
indissolublement, de l’obéissance des magistrats patriciens à la volonté du
peuple (leges publicae)» (Catalano-Lobrano
2007). En assumant la T.P., Auguste assume aussi cette ligne conceptuelle. Scheid 2007, XXXIV et sq. nous invite à
le croire: «Th. Mommsen a considéré que les Res gestae étaient
destinées à la plèbe urbaine de Rome. La discrétion du texte sur l’imperium
d’Auguste, ainsi que l’accentuation de la puissance tribunicienne et des
distributions étaient censées appuyer cette hypothèse […]. La mention de la
puissance tribunicienne n’était sans doute pas uniquement un clin d’œil à la
plèbe. Elle proclamait peut-être en même temps que son détenteur n’était pas
seulement le champion de la plèbe, mais qu’il était capable de la contrôler» (c’est ici le thème cicéronien de la temperatio reipublicae par
les tribuns qui fait surface). Cette remarque, attentive à la substance du
pouvoir augustéen, explique pourquoi les catégories républicaines (garantie
tribunicienne comprise), loin d’être fictives, ne pouvaient être que vitales.
Mais, du point de vue du strict droit public romain, il faut aller plus loin si
l’on souhaite définitivement dépasser la thèse de la compensation civile.
Tacite nous met sur la voie : en recevant la T.P., Auguste dispose dans la cité
d’un titre prééminent, supérieur à tous les autres pouvoirs (summi fatigii vocabulum–imperia praemineret). Juridiquement, constitutionnellement,
cette puissance n’a de sens que si on la conçoit en romain:
comme un contre-pouvoir visant au contrôle dans la cité des titulaires des
magistratures anciennes (Mastino
2006); comme un pouvoir «négatif » par conséquent. En somme, ce n’est pas
tant la plèbe qu’il s’agit de « contrôler » que les magistrats du
peuple romain eux-mêmes (afin de garantir, comme précédemment, le respect des
droits et privilèges des strates les plus basses de la population). Telle est
la signification conceptuelle – extrêmement classique!
– de la T.P. d’Auguste: une signification d’opposition possible et nécessaire
dans l’«Etat», efficacement décrite par Cicéron dans
son De Republica (2.33.58) lorsqu’il évoque
l’établissement des tribuns de la plèbe en 494: …ut contra consulare imperium!
Auguste, on le sait, «essaiera de lutter contre le capitalisme financier» (Ellul 1961, 428-9 qui en précise les
effets immédiats: retrait des impôts aux sociétés de publicains au profit de
petits capitalistes locaux; besoin pour les compagnies financières d’être
domiciliées à Rome et reconnues par les censeurs; tarissement de la
spéculation). Du point de vue moral (et juridique à la fois), un détail nous
semble fort: Auguste sanctionna du blâme censorial, de
la nota, des chevaliers qui avaient emprunté de l’argent à intérêt pour le
placer ensuite avec un intérêt plus fort (Suétone, Aug.,
39). Il est en outre probable qu’Auguste, comme César avant lui, ait confirmé
la limitation des taux d’intérêt fixée par le Sénat en 51 à 12% par an (Andreau 2001, 173-4 qui se fait écho
d’une des thèses de l’ouvrage de référence en la matière:
Billeter, Geschichte
des Zinsfußes im griechisch-römischen Altertum bis
auf Justinian, 1898).
Disons généralement qu’Auguste, sans vouloir supprimer les activités
financières des banquiers et d’autres financiers spécialisés, ne renie pas les
antiques mores de Rome : de la sécession de la plèbe de 494 à Caton
le censeur † 149 (lequel nous informe du rapport fait par les anciennes lois de
Rome entre l’usure et le vol) en passant par le plébiscite Sempronius de 193
réprimant les «fraudes des usuriers».
L’intervention des
empereurs païens/chrétiens en la matière (lutte contre l’iniquité des rapports
d’obligations) est bien connue grâce notamment au Corpus Iuris
de Justinien. Le taux d’intérêt conditionnant le crédit (associée aux
possibles intérêts de l’intérêt : l’anatocisme) est en effet l’un des
aspects de la vie financière dont le pouvoir impérial s’occupera le plus
constamment : voir généralement Codex 4.32 (titre De usuris)[14]. Pour notre sujet (Auguste et la
puissance tribunicienne), on s’autorisera une observation. Il semble
évident qu’on ne peut comprendre ce type de défense impériale à vocation
universelle (mise en place d’une équité naturelle) si l’on s’interdit
méthodologiquement l’accès au fondement juridique et idéologique de l’action
impériale : la fonction tribunicienne. Or, l’effet secondaire de l’isolement
scientifique de la T.P. de la plus large défense de la plèbe (entériné du reste
par la séparation, en doctrine, des droits public et privé de Rome) est une
lacune systématique des traités de droit romain des obligations. Non que les
spécialistes n’aient accès aux règles impériales réglant jusqu’à Justinien les
rapports entre les parties en matière de prêt, bien au contraire; mais parce
qu’on admet difficilement que l’empereur romain, à commencer par Auguste,
puisse incarner la défense de la partie la plus faible sur le fondement son
tribunat[15].
Andreau J., Banque et affaires dans le monde
romain (IVe siècle av. J.-C. - IIIe siècle ap.
J.-C.), Seuil, Paris,
2001. – Billeter, G., Geschichte
des Zinsfußes im griechisch-römischen Altertum bis auf Justinian,
Teubner, Leipzig, 1898. – Catalano,
P., «Usure et dette
internationale», in Diritto @ Storia. Rivista internazionale di Scienze Giuridiche e Tradizione Romana 2/2003. – Catalano P. - Lobrano G., «MMD
Anniversario della secessione della plebe al Monte Sacro. Promemoria
storico-giuridico», in Diritto @
Storia 6/2007. – De Martino F., Storia della costituzione romana
IV.1, Jovene, Naples, 1962.
– De Visscher, F., «Les pouvoirs d’Octavien en l’an 32 av. J.-C.», in Nouvelles études de droit romain public et privé, Giuffrè, Milan, 1949, 1-26. – Ellul J., Histoire des institutions. L’Antiquité,
Presses Universitaires de France, Paris, 1999 (réédition de l’éd. de 1961). – Ferrary J.-L., «A
propos des pouvoirs d’Auguste», in Cahiers du Centre Gustave Glotz, 12, De Boccard, Paris,
2001, 101-154. – Gaudemet J., Les
institutions de l’Antiquité, Montchrestien, Paris, 1998 (5e éd.). – Grenade, P., Essai sur les origines
du Principat (Investiture et renouvellement des pouvoirs impériaux),
B.E.F.A.R, vol. 197, De Boccard, Paris, 1961. – Humbert M., Institutions politiques
et sociales de l’Antiquité, Dalloz, Paris, 1999 (7e
éd.). – Jones, A.H.M., «The imperium of Augustus», in Journal of Roman Studies, 41, Cambridge University
Press, 1951, 112-119. – Lamboley J.-L., Lexique d’histoire et de civilisation
romaine, Ellipses, Paris, 1995 (2e éd.). – Mastino A., «Osservazioni sullo sviluppo della potestà tribunicia durante l’età imperiale:
contenuti e sistemi di computo», in Diritto @ Storia 6/2007. – Mommsen
Th., Romisches Staatsrecht,
Leipzig, 1871-1888 = Droit public romain, Paris, 1887-1896 (trad. P. F.
Girard). Rééd. De Boccard,
Paris, 1984 (vol. V pour la T.P. de l’empereur romain). – Monier R., Manuel élémentaire de
droit romain II, Domat-Montchrestien, Paris, 1936. – Kunkel W., «Bericht über neuere Arbeiten zur römischen Verfassungsgeschichte.
III», in Zeitschrift
der Savigny-Stiftung für Rechtsgeschichte, 1958, 302-352. – Scheid, J., Res
Gestae Divi Augusti (texte établi et traduit par J. Scheid),
Belles Lettres, Paris 2007. – Syme,
R., La Révolution romaine, Gallimard, Paris, 1978 (trad. fr. de l’ouvrage de 1939). – Trisciuoglio A., «La tuitio del defensor civitatis nell’Italia ostrogota. Spunti dalla lettura
delle Variae di Cassiodoro»,
in Ravenna Capitale. Territorialità e personalità, Maggioli editore, Ravenne, 2013,
27-45. – Villers, R., «Le dernier siècle de la République romaine. Réflexions sur
la dualité des pouvoirs», in Mélanges H. Levy-Bruhl, Sirey, Paris, 1959, 07-316.
Through
integration of his powers within the republican constitutional context and
tradition, Augustus intends to restore the Respublica.
A key aspect to this great project is the recognition of the plebeian
dimension of the Roman ius civile, at the risk of connecting with the very
essence of the Tribunate of the plebs! At stake is a tribunician
power that lies firmly on the foundations of the Empire.
En inscrivant ses
pouvoirs dans la tradition constitutionnelle de la Respublica,
Auguste compte «restaurer» celle-ci. Aspect
fonctionnel à ce grand projet: assumer la dimension plébéienne
du droit de la cité romaine, quitte à renouer avec l’essence première du
Tribunat de la plèbe ! Tel est l’enjeu majeur d’une puissance
tribunicienne résolument convoquée sur les fonds
baptismaux de l’Empire.
[Per la pubblicazione degli articoli della sezione “Tradizione Romana” si è applicato, in maniera rigorosa, il procedimento di peer review. Ogni articolo è stato valutato positivamente da due referees, che hanno operato con il sistema del double-blind]
[1] Dion Cassius, 53.32.5; Suétone, Aug.,
27.5; Orose, 6.18.34, 6.20.7; Appien, 5.132; Tacite, Annales, 3.56.2;
naturellement, Auguste lui-même (Res Gestae Divi Augusti).
[2] Remontons le temps. Dès 27, l’imperium consulaire
ne suffisant plus, Octave se fait attribuer l’imperium proconsulaire
(militaire): cet imperium est reconnu supérieur
à un imperium proconsulaire classique car l’auctoritas
d’Auguste le transcende. A cette date, les deux bases du pouvoir sont donc
l’imperium (consulaire; proconsulaire) et l’auctoritas. La nouveauté de 23 (abdication du
Consulat/attribution de la T.P.) permet de considérer, au plus fort, que «les pouvoirs conférés à Auguste n’étaient autres que ceux
des tribuns et ceux des gouverneurs de province. Ils étaient donc repris à la
tradition républicaine […] La réunion des pouvoirs essentiels au profit d’un
seul titulaire et à titre viager transformait le régime républicain en un
régime impérial» (J. Gaudemet,
1998, 277). Relevons d’ailleurs qu’Auguste peut alors
«cumuler» la T.P. et ses autres pouvoirs dans la seule mesure où il a
séparé l’imperium de la magistrature qu’est le Consulat (J. Ellul 1961, 414-415).
[3] Qu’il nous soit permis de citer in extenso la grande
thèse mommsénienne du Palladium: «Enfin, le
tribunat était l’antique palladium de cette démocratie, de laquelle le
principat était né et qu’il ne reniait pas ; il était, en même temps qu’un
pouvoir constitutionnel d’exception dégagé d’attributions spéciales
essentielles (III, 318), la plus haute, la plus sainte, la plus libre de toutes
les magistratures, une magistrature placée sous la protection spéciale des
dieux, dont le principat sut utiliser à son profit les accroissements dus à la
démagogie républicaine (III, 351), une magistrature pourvue d’un droit presque
illimité de prohibition, à l’encontre de toutes les autres (III, 334) et d’un
pouvoir de protéger tous les opprimés, également illimité et rendu
excessivement efficace par son indétermination même (III, 78). Déjà celui des
Romains qui avait jeté l’idée du principat dans l’Etat,
C. Gracchus, avait reconnu dans le tribunat son instrument approprié. Il avait
échoué faute de commandement militaire. Auguste pouvait espérer arriver à ses
fins, en associant la puissance tribunicienne à l’imperium exclusif. Et
sa supposition s’est réalisée». Plus généralement,
consulter les pages 145-158 sur la puissance tribunicienne de l’empereur
romain.
[4] La T.P. apporte à Auguste «tous
les pouvoirs civils qu’il perdait en renonçant au consulat : le pouvoir de
présider l’assemblée tribute, donc d’élaborer une législation qui sera extrêmement
féconde, et le pouvoir de convoquer le sénat. Il s’y ajoute le pouvoir d’aider
le peuple et de le protéger (l’auxilium) »
(M. Humbert 1999, 367-368).
[5] Note de bas de page que l’auteur nuance ainsi: «mais cela ne signifie pas qu’il y ait eu là une
menace latente contre la vieille nobilitas».
[6] En tant que dictateur, César ne pouvait revêtir la
charge de tribun : d’où le fait qu’il se soit fait attribuer certains éléments détachés
du tribunat (comme la sacrosainteté). Cf. J. Ellul 1961, 415.
[7] « Comme la République antérieure, le principat se
fonde sur la souveraineté du peuple. Les pouvoirs de l’Etat
n’exercent pas un droit propre, ils exercent tous, par représentation, les
droits du peuple ; le prince lui-même n’est rien de plus qu’un magistrat,
et un magistrat investi non pas d’une toute puissance qui le mette au-dessus de
la constitution, mais d’une compétence incorporée dans les institutions
constitutionnelles et entourées de limites fixes […] »
[8] Interprétation plus ouverte de J. Gaudemet, 1998, 280 : «La puissance tribunicienne est
détachée, elle aussi, du tribunat. Elle avait déjà servi les entreprises des
réformateurs qui avaient vu dans le tribunat l’arme la plus efficace pour
réaliser leurs projets. […] Mal définie, cette puissance n’en est que plus
considérable. Fondée sur une idée de salut public où convergent de vieilles
traditions plébéiennes et l’idéologie grecque, elle justifie toutes les entreprises».
[9] Remarque à cet endroit importance de R. Villers 1959, 307 : le
principat constitue l’unification dans la personne du prince des deux pouvoirs,
le « national » et le tribunicien ; mais cette unification ne
dérive pas de la nécessité de dépasser le dualisme des pouvoirs mais de causes
inhérentes à la conquête du pouvoir personnel.
[10] Annales,
3.56.2 : …summi fastigii
vocabulum Augustus reperit
ne regis aut dictatoris nomen adsumeret ac tamen
appellatione aliqua certa imperia praemineret
(trad. fr. J.-L. Burnouf,
1859 : « C’est le titre qui avait attaché au rang suprême la
politique d’Auguste, qui, sans prendre le nom de roi ni de dictateur, en
voulait un cependant par lequel il dominat tous les autres pouvoirs »).
[11] Deux aspects largement mis en valeur par J. Scheid 2007, p. 44 : « Pas
davantage que les tribuns de la plèbe n’étaient "sacrés", Octavien
n’était élevé vers la divinité. Mais il était ainsi protégé, juridiquement et
idéologiquement, contre d’éventuels attentats, et de surcroît cette qualité et
le droit d’user le banc des tribuns le signalait comme le défenseur de la
plèbe. Aucun pouvoir n’était attaché à ces privilèges, ils interdisaient
seulement de porter la main sur celui qui à l’instar
des tribuns de la plèbe était sacrosaint ».
[12] De legibus 3.7.15-16 (trad. fr. Ch. Appuhn, 1932) : « Convient-il
qu’il y ait dans la cité un magistrat unique auquel obéissent les autres, ainsi
que nos ancêtres l’ont jugé bon après l’expulsion des rois ? Le
gouvernement monarchique qui avait plu d’abord étant tombé dans le discrédit,
moins à cause de son caractère propre que par la faute d’un mauvais roi, c’est
le nom de roi qu’il semble qu’on ait proscrit, en gardant la chose, si un seul
magistrat commande à tous les autres. C’est pourquoi ce n’est pas sans motif
que Théopompe à Sparte voulut opposer les éphores aux rois, et que chez nous ce
sont les tribuns qui s’opposent aux consuls [Quare
nec ephori Lacedaemone sine
causa a Theopompo oppositi regibus nec apud nos consulibus tribuni] ».
[13] De legibus 3.10.24-25
[14] Sur lequel P. Catalano
2003. L’auteur précise (en insistant sur Justinien) : « Il faut rappeler
l’exemple du droit universel établi par l’empereur Justinien Ier qui se
chargera, même contre les coutumes locales (auxquelles il reconnaissait
néanmoins une valeur législative), de s’opposer à ce qu’il appelait machinationes creditorum,
surtout des "personnes illustres" et des banquiers et commerçants. Je
me réfère à la constitution de 528 (C. 4.32.26) qui fixa la limite maximum de
6% pour les intérêts en général (4% pour les "personnes
illustres" ; 8% pour les banquiers et commerçants). Une constitution
de 529 (C. 4.32.28) confirma ensuite les lois antiques qui interdisaient les usurae usurarum
(anatocisme) ».
[15] A l’encontre une telle perception, on évoquera
sommairement le principe de défense impériale des plèbes citadines mis en place
au IVe siècle par les empereurs Valentinien Ier et Valens. Les defensores civitatis
sont localement un mécanisme de défense contre l’injustice des puissants: ut plebs […] contra
potentium defendatur iniurias. Sont notamment visés les
«abus de pouvoir» des fonctionnaires impériaux en province (officiaux,
juges, le gouverneur lui-même) et/ou des magistrats locaux. Il s’agit toutefois
d’un mécanisme dont la technique et la portée sont à saisir plus largement, du
point de vue politique et social (voire économique), en ce qu’il est institué
au profit de la plebs urbaine (et des
habitants de la campagne, rus) contre la catégorie générale des «puissants» (potentes). De
là la proximité, si ce n’est l’équivalence dans les sources, entre defensor civitatis et
defensor plebis
— notions qu’une partie de la littérature juridique continue à distinguer pour
des raisons conceptuelles (défenseur des citoyens/avocat des pauvres). Ce qui
n’est pas/plus le cas de Justinien au VIe siècle. Du point de vue juridique, il
difficile pour nous Modernes de saisir la défense civile des IVe-VIe siècles
sans considérer la notion (même historiographique) de «pouvoir
négatif»: un pouvoir existant à côté d’un «pouvoir positif» de gouvernement (la
magistrature). La référence à la «plèbe » est à
cet égard très pertinente dès l’instant où on l’oppose – non plus au patriciat
mais – aux puissants. Cette structuration juridique bipolaire de la vie
politique locale (une donnée traditionnellement romaine si l’on se réfère à la
République patricio-plébéienne et au fondement
juridique du pouvoir impérial : imperium proconsulaire et potestas sacrosainte tribunicienne) permet de
nuancer certaines explications historiques (voire circonstancielles) du defensor civitatis,
artificiellement reliées à la thèse de déclin de l’Empire. Sur le rapport entre
équité dans les contrats (contrat de vente notamment) et figure du defensor, voir dernièrement A. Trisciuoglio 2013, 37 et sq.